Le président Trump frappe le régime syrien

07 - Avril - 2017

Le président Trump frappe le régime syrien

Les Etats-Unis sont spectaculairement passés à l’attaque contre le régime de Bachar Al-Assad, jeudi 6 avril, en début de soirée, avec les frappes militaires contre une base de l’armée syrienne située près de Homs. Le bombardement à l’arme chimique d’un village tenu par les rebelles syriens, Khan Cheikhoun, mardi, imputé au régime, a fait basculer la nouvelle administration. « Aucun enfant de Dieu ne devrait avoir à subir une telle horreur », a déclaré Donald Trump, après les frappes, dans une allocution prononcée depuis sa résidence privée de Mar-a-Lago, en Floride. Selon les Etats-Unis, les avions impliqués dans l’attaque de mardi étaient partis de la base ciblée par cinquante-neuf missiles Tomahawk.
Alors que les discussions s’enlisaient aux Nations unies sur le contenu de résolutions concurrentes condamnant l’attaque, l’administration n’avait cessé auparavant d’afficher sa détermination. « Ce qu’Assad a fait est terrible. Ce qui s’est passé en Syrie est une honte pour l’humanité et il est au pouvoir, donc je pense que quelque chose devrait se passer », avait indiqué M. Trump à bord de l’Air Force One qui le conduisait à une rencontre avec son homologue chinois, Xi Jinping, en Floride.
Egalement présent en Floride, le secrétaire d’Etat, Rex Tillerson, avait promis en début d’après-midi « une réponse appropriée à cette attaque aux armes chimiques qui viole toutes les résolutions précédentes des Nations unies [et] les normes internationales ». M. Tillerson avait également demandé publiquement à la Russie, alliée militaire du régime syrien, de reconsidérer son soutien.
Ce revirement est intervenu alors que la nouvelle administration s’était pourtant publiquement résignée, le 30 mars, à la résilience de Bachar Al-Assad. En visite en Turquie, M. Tillerson avait tout d’abord assuré que « le sort du président Assad, à long terme, sera décidé par le peuple syrien ». L’ambassadrice américaine aux Nations unies, Nikki Haley, avait été encore plus précise en assurant que Washington devait « choisir ses batailles ». « Quand vous regardez la situation, il faut changer nos priorités, et notre priorité n’est plus de rester assis là, à nous concentrer pour faire partir Assad », avait-elle ajouté.
« Dictateur »
Cette résignation remontait en fait beaucoup plus en amont. Pendant la campagne présidentielle, M. Trump avait copieusement critiqué la double opposition américaine, à la fois à l’organisation Etat islamique (EI) et au régime de Bachar Al-Assad, la jugeant improductive. Dans un entretien au New York Times, en juillet 2016, il avait qualifié le président syrien de « sale type » qui « a fait des choses horribles ». Mais il avait ajouté vouloir donner la priorité au combat contre les djihadistes. En février, le président syrien avait envoyé un message à son attention en défendant son décret anti-immigration, bloqué par la justice, qui pénalisait particulièrement les réfugiés et les migrants syriens.
Les images des victimes du bombardement du 4 avril ont apparemment tout remis en cause. Après un premier communiqué dénonçant tout autant l’attaque imputée et l’impuissance de l’administration précédente, M. Trump est revenu, à plusieurs reprises, sur son caractère « horrible », en mentionnant notamment le sort de nourrissons pris au piège, mercredi dans les jardins de la Maison Blanche, aux côtés du roi Abdallah II de Jordanie, puis jeudi au cours de la brève allocution prononcée après les frappes.
Dans cette allocution, M. Trump a semblé renouer avec le double front de son prédécesseur. Il a invité les « nations civilisées » à se joindre aux Etats-Unis à la fois pour mettre fin « au massacre et au bain de sang en Syrie » dans une allusion aux exactions du « dictateur Assad », et pour mettre fin au « terrorisme de toutes sortes et de tous types », sans mentionner explicitement, comme auparavant, l’islamisme radical. Le président a justifié cette intervention unilatérale, en dehors de tout cadre international, en assurant qu’« il est dans l’intérêt vital de la sécurité nationale des Etats-Unis d’empêcher et de dissuader la dissémination et l’utilisation d’armes chimiques mortelles », ajoutant que le régime syrien avait violé le droit international en y recourant.
Cette réaction américaine était pourtant d’autant moins prévisible que Donald Trump avait enjoint publiquement au président Barack Obama de ne pas intervenir en Syrie en 2013, après le recours imputé au régime à des armes chimiques dans la banlieue de Damas, en août. Ces attaques avaient pourtant causé bien plus de morts que celle de mardi. M. Obama avait douté de l’effet de frappes, pour lesquelles avait plaidé au contraire avec force son secrétaire d’Etat, John Kerry, qui jugeait que la crédibilité américaine était en jeu.
La décision de M. Trump, qui avait assuré ne pas vouloir jouer le rôle de « gendarme du monde », a été saluée par Hillary Clinton, son ancienne adversaire démocrate à la présidentielle, comme par les « faucons » républicains, notamment les sénateurs Marco Rubio (Floride), Tom Cotton (Arkansas) et surtout John McCain, le président de la commission des forces armées du Sénat et critique parmi les plus incisifs de la nouvelle administration. Elle a été en revanche critiquée par le sénateur républicain Rand Paul (Kentucky), un libertarien hostile à toute forme d’interventionnisme qui a déploré le fait que le Congrès n’ait pas été consulté.
Les images tournées par l’armée américaine de missiles Tomahawk quittant les pontons de ses bateaux ont ramené les Etats-Unis vingt ans en arrière, lorsque le président Bill Clinton ordonnait des frappes similaires contre le régime de Saddam Hussein, en Irak. Ce rappel historique souligne d’ailleurs les limites des interventions de ce type.
Faire passer un message
Après l’annonce des frappes, M. Tillerson, qui doit se rendre le 12 avril pour la première fois à Moscou, a mis en cause la Russie, jugée incapable de faire respecter l’accord qu’elle avait obtenu pour mettre un terme à la crise de 2013. Moscou s’était fait fort de s’entendre avec Damas pour obtenir que le régime syrien remette toutes ses armes non conventionnelles. M. Tillerson a laissé entendre que les frappes de jeudi ne marquaient pas le début d’une campagne plus vaste.
M. Trump a répété, pendant la campagne, qu’il n’avait pas de goût pour les changements de régime. La riposte américaine au bombardement, circonscrite à une base aérienne, semble viser principalement à faire passer le message que le président syrien n’aura pas les mains libres comme avec l’administration précédente, et que M. Trump est déterminé à faire respecter ses propres « lignes rouges ». Ce message sera également reçu à Pyongyang, l’autre adversaire des Etats-Unis qui multiplie les tirs balistiques pour tester Washington. Mais les tirs de jeudi soulèvent une question pour l’instant sans réponse : que veut vraiment Donald Trump en Syrie ?

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