Affaire Khalifa Sall: Situer toutes les responsabilités

27 - Février - 2017

Affaire Khalifa Sall: Situer toutes les responsabilités

Au Sénégal, nous courrons tous un danger potentiel qui décrédibilise le pouvoir judiciaire et démontre combien l’usage du mot « justiciable », pour désigner l’ensemble de la population qui est potentiellement sous le coup d’un emprisonnement chaque jour que Dieu fait, est malheureusement et encore pour longtemps d’actualité.

En effet, nous pouvons effectivement chaque jour aller grossir le rang de ceux que l’on emprisonne sans jugement et que l’on libère sans verdict. Cet exploit juridique proprement sénégalais ne date cependant pas d’aujourd’hui, mais il s’est exacerbé sous le régime actuel. Après Jean Paul Dias qui l’aura expérimenté il y a quelques années sous le régime libéral, les ténors du PDS y ont amèrement goûté, ainsi que l’illustre Cheikh Alassane Sène, emprisonné sous le régime de l’isolement complet et libéré sans ménagement après 14 mois de détention !

Ces emprisonnements frappent des hommes politiques dont le dénominateur commun est d’être fichés opposants radicaux au régime mackyen.

Celui qui est tout désigné pour aller à l’échafaud est présentement Khalifa Sall, sous le coup d’une inculpation imminente et de poursuites judiciaires subséquentes dont le dénouement sera sans nul doute un passage à la case Rebeuss, pour aller tenir compagnie à ses lieutenants qui lui chauffent la place, en attendant.

Le rapport de l’IGE est d’après nos sources accablant à son encontre, tant les faits de prévarications de deniers publics qui pèsent sur lui seraient constants, et concerneraient des sommes faramineuses.

L’un des arguments avancés pour sa défense serait que cette caisse d’avance date d’il y a longtemps, et qu’il n’aurait fait que perpétuer des pratiques en cours depuis 1920 ; et que donc les dépenses diverses d’où il puisait ces sommes étaient le cadre indiqué pour exécuter ces dépenses !

Il faut commencer par préciser que parlant d’une loi, il y a les concepts d’esprit et de lettre ; quand souvent l’on privilégie l’interprétation et l’application d’une loi en se basant sur l’esprit, il faut veiller à ce que cela n’entre pas en contradiction flagrante avec la lettre, ce qui pourrait constituer une entorse ou pire une violation de cette loi, et en conséquence, engendrer une sanction à la hauteur de l’infraction commise. Et l’on découvre alors à ses propres dépens que dura lex certes, mais ser lex !

En plus il faut savoir au Sénégal que nos pratiques administratives sont codifiées. Et l’essentiel de nos textes dans ce domaine date de l’époque coloniale qui en constitue le substrat. De ce fait, ils sont en déphasage par rapport au contexte actuel. D’où un sérieux problème pour concilier leur application adéquate et la prise en charge correcte des aspirations de la population surtout en termes de gestion budgétaire et comptable.

En matière de gestion de caisse d’avance, les dispositions légales stipulent que le maire de ville peut mobiliser au maximum trente millions de francs CFA pour sa caisse d’avance, et les montants des dépenses engagées par cette caisse d’avance devraient se chiffrer à deux cent mille francs CFA par mandat.

Ces dépenses doivent faire l’objet de justifications déposées auprès du receveur percepteur municipal par le responsable de la gestion de la caisse d’avance, avant son renouvellement.

C’est donc dire que le Maire, qui ne manipule pas de l’argent, est tenu de satisfaire à ce contrôle rigoureux de la part du percepteur dont la responsabilité personnelle et pécuniaire est engagée, en conséquence.

Si cette caisse d’avance a été renouvelée de manière régulière et automatique chaque mois depuis le magistère de Khalifa Sall, c’est qu’il aura satisfait à tous les contrôles et obtenu tous les visas pour la mise à disposition mensuelle de ces fonds.

Et ce même percepteur aussi aura obtenu le visa de la Cour des comptes auprès de qui il dépose chaque année son compte de gestion pour contrôle. On ne peut donc normalement poursuivre sous le coup du rapport de l’IGE Khalifa Sall sans ausculter le compte de gestion du receveur municipal de Dakar d’alors.

Etablir qu’il a détourné de l’argent équivaudrait à déterminer aussi la chaine de complicité dont il aurait bénéficié, au premier rang de la quelle le receveur percepteur municipal de Dakar.

Et donc, en l’espèce il serait indiqué d’auditer aussi les comptes de gestion qu’il a successivement déposés à la Cour des Comptes, et qui n’ont jamais fait l’objet d’une contestation de la part des magistrats vérificateurs de cette cour.

Et d’ailleurs, il me semble que cet agent du trésor a si bien donné satisfaction à sa hiérarchie, qu’il a été promu agent comptable des grands travaux de l’Etat. En effet, Mamadou Oumar Bocoum a bouclé dix ans à la RPM de Dakar, les yeux rivés sur un poste qu’il voulait absolument dans son ministère ; il ne l’a pas eu, mais le bonhomme n’est pas à plaindre : il vient de faire les choux gras de la presse people, et de la presse tout court, avec l’étalage scandaleusement ostentatoire de richesses dont il a fait montre, lors du mariage de sa fille au point que la population survoltée a requis l’auto saisine de la CREI.

Khalifa Sall je le répète sera certainement emprisonné, ou privé d’une manière ou d’une autre de la possibilité de diriger une liste électorale aux législatives. Gageons que ce sera comme souligné plus haut sans jugement car ceux qui risqueraient de plonger avec lui sont « intouchables » !

L’Acte III dans le cadre de son parachèvement devra veiller à corriger tous les dysfonctionnements des collectivités territoriales surtout au plan de la gestion budgétaire et comptable, pour éviter à l’avenir que pareille cas ne se reproduise.

La frontière entre légalité et responsabilité dans la gestion des collectivités locales est très ténue en effet. L’intérêt des populations dans la prise en charge de leurs besoins spécifiques par nos exécutifs est à préserver, et en ce sens, il est inconcevable de priver les maires de moyens financiers d’intervention.

Maintenant que les « arrangements » avec les lois et règlements en vigueur semblent utilisés comme armes politiques, il convient d’exiger que la loi s’applique à tout le monde.

Ce qui est une autre affaire !

Cissé Kane NDAO

Président A.DE.R

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