David Diop, un panafricaniste pour la jeune génération

01 - Avril - 2017

David Diop, un panafricaniste pour la jeune génération

Voici David Diop, le jeune poète au destin tragique, le militant de la cause noire, le chantre de la lutte pour la libération de l’homme opprimé. Né le 9 juillet 1927 à Bordeaux, d’un père sénégalais et d’une mère camerounaise, il n’a pas véritablement connu ce père, arraché à son affection lorsque le petit David n’avait que huit ans. Il n’a pas non plus connu cette Afrique qu’il a tant aimée et chérie à distance. Il écrira plus tard dans son recueil Coups de pilon : «Afrique mon Afrique/ Afrique des fiers guerriers dans les savanes ances­trales/Afrique que chante ma grand-mère/Je ne t’ai jamais connue/Mais mon regard est plein de ton sang.»
Combien de générations d’écoliers africains ont appris, mémorisé et même assimilé ce fameux poème de David Diop plein de lyrisme et de nostalgie ? David est un de ces rares poètes militants dont l’œuvre est restée gravée dans la mémoire populaire :
Afrique dis-moi Afrique
Est-ce donc toi ce dos qui se courbe
Et se couche sous le poids de l’humilité
Ce dos tremblant à zébrures rouges
Qui dit oui au fouet sur les routes de midi
Repéré très tôt par le grand poète Léopold Senghor qui a du reste été son professeur, David Diop a vu ses écrits publiés dans la prestigieuse revue Présence africaine. Dans son Anthologie de la poésie nègre et malgache de langue française, le Président-poète dira de David Diop que sa poésie est «l’expression violente d’une conscience raciale aiguë. L’accent est âpre et rêche, le ton est brutal et dur». David Diop est un penseur radical, sans concession et qui a horreur des compromissions. Il écrit dans un texte intitulé «Réforme de l’enseignement en Guinée» : «Hypocrisie donc que de parler de symbiose de civilisations, de profits réciproques dans une communauté dont les universités ignorent jusqu’aux noms de nos grands penseurs et passent sous silence l’histoire de nos empires. Seuls peuvent s’en accommoder les tenants d’un cosmopolitisme culturel habillé d’oripeaux exotiques.» En effet, le propos de David Diop révèle une pensée radicalement dissidente. David Diop est un philosophe en ce qu’il vivait ce qu’il disait. Il a écrit à Alioune Diop, fondateur de Présence africaine, une lettre qui se passe de commentaire : «Mon cher Alioune, je pars pour la Guinée au début de la semaine prochaine en compagnie de Abdou Moumouni, de Joseph Ki-Zerbo et quatre autres professeurs africains. Comme je l’ai écrit, il est des cas où celui qui se prétend intellectuel ne doit plus se contenter de vœux pieux et de déclarations d’intention, mais donner à ses écrits un prolongement concret. Seule une question de famille m’a fait hésiter quelque temps, mais après mûre réflexion, ce problème ne m’a pas paru être un obstacle à mon départ.» En 1958, il partit donc enseigner en Guinée, répondant à la voix de Sékou Touré qui, après son fameux «Non» au général De Gaulle, fit appel aux cadres africains pour l’aider à combler le grave déficit de ressources humaines à l’époque. Alors qu’il était en vacances administratives, il meurt au large des côtes du Sénégal dans un accident d’avion le 29 août 1960. C’est ainsi que finit la vie du plus prometteur des jeunes poètes africains. Il disparut avec plusieurs de ses manuscrits que l’on ne retrouvera jamais. Il n’a pratiquement laissé à la postérité que ce fameux recueil de poèmes publié après sa mort.

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