Education nationale LES PISTES DE FINANCEMENT ENDOGENES

07 - Février - 2018

2,3 milliards dollars mobilisés lors de la 3ème conférence de reconstitution des ressources du Partenariat mondial pour l’Education (Pme). Un succès retentissant pour les organisations, pour relever le défi d’une scolarisation de millions d’enfants. Cette mobilisation de ressources financières au niveau international, a longtemps animé le débat au niveau national. C’est le cas du Sénégal qui a dégagé de pistes de financement endogènes pour son secteur éducatif. Le rapport final des assises de l’Education et de la Formation y consacre un chapitre important qui mérite, selon la société civile, d’être matérialisé.

La 3ème conférence de reconstitution des ressources du Partenariat mondial pour l’Education (Pme) a baissé ses rideaux la semaine dernière, sur fond de satisfaction avec à la clé 2,3 milliards dollars mobilisés. A côté de cette mobilisation des ressources financières, la conférence aura été une tribune pour certains de s’illustrer de par leurs discours courageux et engagés sur des questions de fonds.

«L’Afrique doit croire en elle et ne doit plus s’appuyer sur les investissements venus d’ailleurs pour émerger», avait déclaré le président Ghana, Nana Akufo-Addo, non sans relever : «on doit croire en nous-mêmes, et développer nos ressources qui sont de qualité. Et ensuite ôter la corruption de notre continent pour renverser la tendance». Tout comme le président Nana, Achille Mbembé, va plus loin en qualifiant le Partenariat mondial pour l’éducation de «énième para-téléthon».

«En ce qui concerne l’appel en particulier, je crois qu’on ne peut pas chercher à récolter tant d’argent pour l’éducation sans avoir tout remis à plat », souligne l’historien camerounais dans une tribune parue sur le site pointafrique.fr. « Les initiatives venues du bas de nos sociétés sont également étouffées par ces initiatives venues de l’extérieur, avec ces schémas tout faits, de l’argent, et surtout l’arrogance et le mépris. Le fait qu’elles ne sachent ni soutenir, ni se greffer aux potentiels endogènes, est bien l’une des raisons de la destruction du capital humain en Afrique », regrette Achille Mbembé.

A la considération de ces argumentaires, force est de constater que l’Afrique ne doit pas dépendre des autres pour financer son système éducatif. Sommes-nous en mesure de trouver des ressources pour financer ses systèmes éducatifs et des contenus de l’enseignement ?

Cette question rapportée au niveau local, trouve un certain nombre de réponses devant permettre au Sénégal «d’être souverain » en matière de financement de son secteur éducatif ? Les réflexions profondes ont été menées lors des Assises nationales de l’Education et de la Formation (Anef) dirigées par le Professeur Abdou Salam Sall. Si l’Etat a mis la main à la poche – 6% du Pib et 35% du budget national – le secteur reste sous financé. Les besoins persistent, car l’utilisation des ressources allouées est très problématique. Les «Assisards» proposent d’abord une réflexion pour améliorer l’utilisation des ressources, notamment la sensibilisation et le renforcement des capacités des gestionnaires et le contrôle citoyen au niveau de la mobilisation et de l’exécution des budgets particulièrement au niveau des écoles.

BANQUE INNOVANTE EDUCATIVE

Autres niches de financements innovants pour mobiliser des ressources additionnelles en faveur de l’éducation, l’équipe du professeur Abdou Salam Sall préconise, entre autres, « la conversion de créances publiques (dettes extérieures bilatérales) en soutien à l’éducation et formation, la taxe sur le tabac et l’alcool au bénéfice de l’éducation et de la formation, 
le micro taxation sur les appels téléphoniques internes au bénéfice de l’éducation».

Dans le rapport final de la concertation, les «Assisards» ont proposé la «création d’une banque innovante éducative et l’exploitation des opportunités de la Banque islamique pour renforcer la mobilisation de ressources et appuyer le développement du système éducatif».
Selon eux, cette banque éducative va accorder, pas seulement des crédits aux étudiants, mais aussi pour supporter des activités variées du système éducatif. Les actionnaires sont des enseignants – Etat et Collectivités locales – Secteur Privé».

500 MILLIARDS D’EXONERATIONS FISCALES

Les acteurs présents aux Assises avaient invité l’Etat à affecter une partie des ressources sur les mesures fiscales, à l’école. Car, selon eux, «les exonérations et réductions fiscales font perdre 500 milliards à l’Etat chaque année ». En plus de l’Etat, il a été signalé la place importante des collectivités locales dans le financement de l’éducation, un domaine de compétences transférées.

LA POSITION DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE

Les organisations de la société civile sénégalaise du Sénégal veulent un allégement du coût des charges éducatives des parents et d’assurer la gratuité de l’éducation publique. Pour ce faire, elles prônent « l’émission d’obligations à l’intention des expatriés, la conversion des créances publiques, la micro taxation sur les transactions financières et sur certains produits de consommation». Dans son argumentaire, la société civile sénégalaise fait appel à la politique fiscale pour une augmentation des ressources domestiques affectées à l’éducation, considérant des Etats comme le Sénégal, le Nigéria et le Ghana ont perdu environ 5,8 milliards dollars par an à cause d’un système fiscal inefficace et inéquitable, selon International et Tax Network Africa en 2015.

Toujours est-il que l’augmentation des effectifs dans les ordres d’enseignement est suivie par une hausse des dépenses publiques dans l’éducation au Sénégal. Entre 2009 et 2014, l’Etat a injecté dans le secteur 2 700 milliards de francs Cfa. Toutefois, l’enseignant-chercheur, Mamadou Youri Sall, avait souligné que « le Sénégal compte 82% d’apprenants qui n’ont pas dépassé le niveau primaire. Après 13 ans d’études, moins de 5% ont le baccalauréat. Là où dans les pays du Nord, 50% des apprenants décrochent la licence, au Sénégal, on est à 2% ». Les résultats décevants des examens nationaux en attestent. Un taux de réussite de 31,6% en 2017 pour baccalauréat contre 36,6% en 2016. Le Certificat de fin d’étude élémentaire (Cfee) et le Brevet de fin d’étude moyen (Bfem) enregistrent respectivement 45% en 2017 contre 54% en 2016 et 56% en 2017 contre 58% en 2016. Le Sénégal compte toujours 54% d’analphabètes. 1 million d’enfants hors circuit école. Environ 10% des infrastructures éducatives constituées d’abris provisoires, le déficit du personnel enseignant, la détérioration de l’environnement scolaire et des conditions d’apprentissage, ainsi qu’une pénurie de manuels scolaires.

CHEIKH MBOW, COORDINATEUR DE LA COSYDEP : «Nous avons les moyens pour avoir un financement endogène robuste»

«L’éducation doit être un secteur de souveraineté nationale. Nous avons toujours cru à un financement plus endogène. De ce point de vue, nous considérons qu’il y a beaucoup de niches sur lesquelles nous pouvons nous appuyer pour que notre système éducatif soit financé au niveau interne. Le financement doit surtout être orienté vers les familles qui en ont le plus besoin et les enfants qui sont hors école. Nous ne le cesserons de le dire : 90% des bailleurs d’éducation se sont les citoyens. Il faudrait travailler à renforcer notre financement collectif. On pourrait continuer à compter sur le financement extérieur en complément à un financement robuste et endogène. L’autre enjeu est d’aller vers un financement qui converge sur les mêmes objectifs pour une meilleure optimisation des ressources. Donc, une utilisation optimale des ressources pour relever les défis de l’heure, notamment une amélioration des enseignements et apprentissages. Sachant que les principaux bailleurs sont la communauté, nous préconisons un dispositif de réédition de comptes qui permet aux acteurs de tracer le financement de l’éducation.

Je continue à croire que le financement extérieur devrait être limité. Nous devons faire le secteur de l’éducation une question de souveraineté. Limiter les financements entre 5 et 10 %. Nous avons les moyens pour avoir un financement endogène robuste. L’émission d’obligations à l’intention des expatriés, la conversion des créances publiques, la micro taxation sur les transactions financières et sur certains produits de consommation, constituent des niches de financement. Le paradoxe dans notre pays est qu’on ne peut plus inventer de nouvelles théories. Les avis ont été suffisamment partagés. Les consensus ont été également trouvés, y compris les assises nationales. Il faut maintenant être pragmatique dans leur mis en œuvre, avec prise en charge des préoccupations des communautés. Une chose est de financer son éducation, c’en est une autre de faire en sorte d’avoir un budget qui règle les problèmes récurrents. Il s’agit du taux de scolarisation, des abris provisoires, des revendications des syndicats d’enseignants. Il faut réfléchir davantage en terme d’implication des communautés pour l’utilisation des ressources.

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