Elène Tine, leader politique : «Mts est dépassée»

18 - Janvier - 2018

Idy ou Gakou, candidat de Manko taxawu senegaal ? Elène Tine n’affiche pas de préférence. La responsable du Mouvement pour un Sénégal d’éthique et de travail (Mset), investie dans cette coalition dirigée par Khalifa Sall lors des dernières Législatives, entend avec ses camarades étudier les différents projets de société des candidats. Dans cet entretien téléphonique, l’ancien député se prononce sur l’attaque de Bofa-Bayotte et la Présidentielle de 2019.
Quelle lecture faites-vous de l’attaque de Bofa-Bayotte en Casamance qui a fait 15 morts ?
Je voudrais saluer la mémoire de tous ces enfants qui sont morts atrocement dans ces conditions en Casamance. Ensuite, je m’incline devant la mémoire du khalife général des Mourides rappelé à Dieu. J’ai passé la journée à Touba dimanche. Je prie pour que Seri­gne Mountakha ait un khalifat aussi fécond que celui de Serigne Sidy Mokhtar. Pour la Casamance, il faut une union sacrée de tous les Sénégalais de tous bords, au-delà des appartenances politiques. Nous avons connu une accalmie pendant plus de 5 ans. Nous l’avons tous appréciée. Il faudra se retrouver autour de l’essentiel. Le pouvoir doit s’appuyer sur toute personne capable de contribuer à la recherche de solutions en Casa­mance. Actuellement, ce slogan «Sénégal de tous, par tous et pour tous» est en danger. Le président de la République doit prendre de la hauteur et convoquer tout le monde.
Il a tendu la main à toutes les forces vives de la Nation lors de son message de Nouvel An…
Il a pris l’initiative de tendre la main. Aujourd’hui, c’est à lui de mettre en place les conditions du dialogue. S’il décidait d’appeler les gens un à un pour discuter sur cette question de la Casamance, aucun opposant n’oserait ne pas y aller. Il ne faudrait pas faire comme ce simulacre de dialogue national de mai 2016. Si l’opposition ne vient pas, le Peuple va juger. Mais c’est la démarche partisane du régime qui pose problème. Le Président doit se départir de sa démarche trop partisane. Il devait même s’adresser à la Nation, parce que ce sont tous les Sénégalais qui sont meurtris dans leur chair après cette tuerie.
Pourquoi on ne vous entend plus depuis quelque temps ?
Je suis bel et bien présente sur le champ politique et social. Je suis dans des dossiers qui touchent certaines composantes de la population. C’était aussi ma démarche lors de mes 5 ans de Législature à l’Assemblée nationale. Sur le plan politique, on est en train de s’organiser sans bruit ni trompette. Au Sénégal, les gens pensent qu’il n’y a que le bruit qui fait exister. Nous restons plus que jamais engagés et constants par rapport à notre engagement politique.
Est-ce que vous vous organisez dans le cadre de la coalition Manko taxawu senegaal ?
Manko taxawu senegaal était une coalition électorale, comme les 46 autres listes en lice lors des dernières Législatives. On ne peut pas la qualifier pour, par exemple, la future Présidentielle. Pour moi, cette coalition est dépassée.
Donc vous n’en êtes plus membre ?
Je ne le dis pas. Est-ce que Manko, en tant que coalition, existe bel et bien ? Person­nellement, depuis les Législa­tives, il n’y a plus de réunions. On n’a même pas fait de bilan. Il y a une coordination virtuelle qui existe, envoie de temps à temps des communiqués. Avec qui cette coordination parle ou se réunit ? Je ne sais pas.

Etes-vous pour son maintien ?
Je constate que cette coalition est plus ou moins obsolète. Une organisation qui ne se réunit pas. Peut-être que 2 ou 3 personnes se réunissent pour balancer des communiqués. L’existence de cette coalition pose problème. C’est tout à fait normal parce que c’est une coalition pour les Législatives. Je pense que toutes les autres qui ont existé durant ces Législatives sont aussi périmées. Je pense que les gens doivent se retrouver dans des pôles en vue de la Présidentielle de 2019.
Le parti Rewmi «travaille» à faire de Idrissa Seck le candidat de Mts. Qu’est-ce que vous en pensez ?
Je suis convaincue que cette élection présidentielle devrait se faire autour de plusieurs pôles de candidatures. Maintenant, nous sommes à l’écoute. Nous ne voulons pas avoir une position prématurée. S’engager dans une coalition pour la Présidentielle devrait se faire autour d’un programme qui prendrait en compte les préoccupations des Séné­galais, c’est-à-dire une vision commune de là où nous voulons amener le Sénégal. Cela ne doit pas se faire de façon partisane, politicienne ou de profil esthétique. Ce sont les programmes que vont proposer les différents candidats qui vont nous amener à adhérer à une candidature. Pour l’instant, nous continuons à faire notre travail sur le terrain et à suivre ce que les différents pôles vont proposer comme programmes.
Etes-vous toujours membre de Bess du ñiakk ?
Je ne sais pas pourquoi cette question revient toujours. Je n’ai jamais été membre de Bess du ñiakk. On a eu une alliance avec Bess du ñiakk qui était un mouvement citoyen en 2012 lors des Législatives. Nous sommes allés aux élections autour d’une liste citoyenne. Après, Bess du ñiakk est devenu un parti politique. Comme nous, nous restons dans le cadre d’un mouvement dénom­mé Mouvement pour un Sénégal d’éthique et de travail (Mset). Nous n’avons jamais pris la carte de Bess du ñiakk. En réalité, c’est cela. Je ne sais pas pourquoi les gens entretiennent cette confusion. On ne peut pas me dire que les gens qui sont investis dans les 47 listes ont adhéré à ces coalitions. Non ! Ils ont des partis ou des mouvements. Depuis 2012, nous n’avons pas pris de carte d’un parti politique, y compris Bess du ñiakk. Nous restons indépendants.
Dans Mts, Idrissa Seck est appuyé par des proches de Khalifa Sall, tandis que le Grand parti mobilise une caution pour investir Malick Gakou. Lequel de ces deux rencontre votre adhésion ?
Ecoutez, il y a des positions qui sont exprimées. Vous parlez des proches du maire de Dakar. Aujourd’hui, moi et mes amis sommes engagés à poursuivre le combat aux côtés de Khalifa Sall pour que cet acharnement dont il fait l’objet s’arrête. Il faut qu’il retrouve la liberté. Je n’ai pas entendu Khalifa Sall présenter sa candidature pour l’élection présidentielle. Nous continuons à le soutenir face à l’injustice dont il fait l’objet, mais sur le plan politique, on ne peut pas être plus royaliste que le roi. Pour le moment, nous n’avons pas un choix pour un candidat. On étudiera le projet de société qui correspondra à notre vision et nous nous engagerons pour un candidat.
Donc, vous n’avez pas encore eu des discussions avec Malick Gakou ou Idrissa Seck ?
Je vous ai dit que nos discussions dépendront des programmes que ces candidats potentiels proposeront aux Sénégalais. Puisque je dis que Manko est plus ou moins dépassée, il faut des coalitions qui proposeront des programmes aux Sénégalais. Je ne choisis pas un candidat parce qu’il est le plus beau ou le plus futé. Nous attendons des projets de société…
Des projets qui seront différents de celui du Président Macky Sall ?
Le Président Macky Sall s’est basé sur des programmes. Il parle de la Cmu, des Bourses de sécurité familiale, est-ce que cela se matérialise sur le terrain ? Ce sont des questions qu’on se pose. On l’attendait plus en termes de rupture sur la bonne gouvernance. Sur ce plan, il y a beaucoup de déceptions. Maintenant, qu’est-ce qu’il va dire aux Sénégalais, on attend de voir. Je constate qu’il y a beaucoup de pessimisme au sein de Benno bokk yaakaar, en perspective de la Présidentielle. Il y a une différence entre ce que les gens lui disent et le vécu des populations. Le front social est en ébullition partout et il y a trop de scandales. Tout cela n’est pas reluisant. J’espère qu’il en a pris conscience. Il ne faudrait pas que le pouvoir se leurre en pensant qu’en éliminant de rivaux potentiels, le Président sortant sera sur un boulevard. C’est Dieu et le Peuple qui donnent le pouvoir. Karim Wade semble dans une prison à ciel ouvert au Qatar. C’est malheureux parce que c’est un fils du Sénégal qui a des droits. De la même manière, Khalifa Sall ne doit pas être sacrifié sur l’autel d’un prétendu 2ème mandat. Ces gens qui le mènent vers ces dérives se sont toujours débrouillés pour se repositionner avec un autre pouvoir. Ces gens qui sont avec lui étaient où avant ? C’était des pro-Karim Wade à la Génération du concret. Ces gens qui ont accompagné Wade jusqu’à sa chute risquent de faire la même chose avec Macky Sall.
Que pensez-vous de la proposition faite par la majorité, relative au système de parrainage sur les candidats des partis politiques ?
D’abord, il faut préserver nos acquis démocratiques. Je ne sais pas pourquoi la majorité a attendu aujourd’hui pour proposer le parrainage, mais je crois qu’il faut régler le problème de la disponibilité des cartes d’électeur. Ce ne sont pas uniquement des cartes d’électeur, mais des cartes d’identité nationale. La façon dont on gère ces cartes sur le plan de la sécurité pose problème. On a vu des cartes jetées dans des poubelles. Deuxiè­mement, il nous faut un bulletin unique. C’est fondamental. On parle de parrainage, mais si on ne règle pas les conditions d’une élection libre, transparente et démocratique, on n’ira nulle part. On ne peut pas comprendre que tous les pays de la sous-région en soient au bulletin unique et qu’on nous dise que le Sénégal n’est pas prêt. Pourtant, notre pays se targue d’être l’une des plus grandes démocraties d’Afrique.

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