Exposition à la galerie le manège : Alexis Peskine décrit « Le retour de la vague »

13 - Octobre - 2016

La galerie Le manège abrite, depuis lundi dernier, et ce, jusqu’au 31 janvier prochain, l’exposition monographique « Raft of Medusa : le retour de la vague ». Cette œuvre de l’artiste-plasticien russo-brésilien Alexis Peskine est à la charnière de deux époques, mais porte les mêmes récits : ceux du voyage, de l’horreur et de la fatalité. Il « raconte » l’émotion à travers le drame de l’émigration, en s’inspirant du tableau de Théodore Géricault, « Le radeau de la Méduse ».

Alexis Peskine peut se vanter de cette prouesse : son génie « poétique », sorti de son fatras d’idées, ne l’a point incité à raconter présomptueusement la vie. Il en donne humblement des expressions. Celles-ci se libèrent de la trivialité écœurante escortant les mots qui « s’attendrissent » sur le sort des infortunés migrants africains. Il établit un parallèle avec une autre mésaventure en s’inspirant du tableau de Théodore Géricault, « Le radeau de la Méduse ». Celui-ci fait référence à la Méduse, une frégate de la marine royale partie en 1816 pour coloniser le Sénégal. Il s’en est suivi un naufrage le 2 juillet 1816.

L’œuvre de Peskine est en perpétuel mouvement. Elle raconte des aventures, des voyages et met en scène des hommes et des femmes aux aspirations légitimes. Quelquefois suicidaires. La destinée n’y est point l’avenir. C’est l’horreur du présent. Elle fait pâlir des « âmes ébènes » que le plasticien « pose » sur des charrettes et des pirogues par un subtil jeu de disposition de clous. Ici, ces êtres « trop noirs » expriment des émotions à la fois tendres et violentes. L’artiste répare là une injustice. Car, à l’en croire, ailleurs, « les émotions sont véhiculées par le corps blanc ». Celui-là noir est la cuve des stéréotypes.

La conquête des mirages du succès par des peuples d’Afrique est une aventure humaine à narrer. Ceux qui la répandent en ont fait une « chose à gérer ». Alexis Peskine, lui, couvre l’horreur et l’impassibilité d’une intense angoisse. La détermination et la persévérance des aspirants contrastent avec leurs possibilités. Mais, ils n’ont guère peur de voir leurs archaïques pirogues atteindre les rivages du silence. Comme cette femme-là, visage obscur, scrutant majestueusement l’horizon fatalement hostile. Et ailleurs, quelque part où la détresse et l’ivresse s’entremêlent indifféremment, dans la foi en ce destin à accomplir, on s’échine à conquérir le néant. L’essentiel n’est pas dans les moyens. Il est dans l’ardeur, la conviction de pouvoir y arriver.

Conquête du néant
L’artiste russo-brésilien, sénégalais de cœur, enfant du monde par ses pérégrinations, s’inspire de l’œuvre de Géricault en portant le message de son temps, les rêves de ceux que le sort a accablés, leurs émotions. Ne le dit-il pas lui-même : « De cette œuvre émane le fantastique et la violence, la faiblesse et la force, la fatalité et l’espoir, au même titre que les histoires de migrants qui traversent déserts, terres hostiles, mers et océans. Cette affirmation suicidaire qui pousse des milliers à risquer leurs vies pour admirer la beauté de ce monstre destructeur… Elle les pousse à quitter leurs cités bleues pour aller regarder la Méduse dans le fond des yeux ».

L’horreur l’a inspiré. Leurs convoitises justes ont excité sa créativité. « Ces dernières années, la vue de ces nombreuses images de naufrages de bateaux clandestins, remplis d’hommes et de femmes aux rêves légitimes, ont poussé le spectre de l’œuvre de Géricault à refaire surface dans mes pensées », confie-t-il non sans se souvenir de son père qui l’a fait découvrir cette création au musée du Louvre, à Paris. Ici, l’esthétique est à chercher dans l’émotion, dans la capacité de l’artiste de lui donner une acception commune applicable à toutes les couleurs, à toutes les géographies et aux diverses trajectoires des peuples du monde.

Elle est également dans la continuité de la « narration » de ces aventures humaines à travers d’autres expressions artistiques aussi exquises que graves. Avec la photographie, Alexis Peskine fait parler les choses plus que les hommes. Le petit marchand de « Tour Eiffel », venu chercher fortune à Paris, se pare de son grand boubou en « sac immigré » avec sa couronne d’épines sur la tête. Il s’accommode de son nouvel univers davantage qu’il ne se réinvente. La vidéo dont il a fait usage dans cette exposition donne aussi une autre saveur poétique ; celle-là qui trahit le conformisme narratif des existences.

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