EXPOSITION «ALEM L’A-VENIR» JOE OUAKAM : INTEMPOREL, IMMORTEL

08 - Août - 2017

Cette sculpture plus vraie que nature, cette atmosphère qui rappellerait un peu le 17 de la rue Jules Ferry…Vous avez donc rendez-vous avec l’inclassable Joe Ouakam à la galerie Le Manège. Décédé le 25 avril dernier, l’artiste y est pourtant très présent, à sa façon. Intitulée «Alem L’A-venir», l’exposition est à voir jusqu’au 12 novembre prochain.

Vous trouverez quelques morceaux de son âme, de son génie sinon un peu de son grain de folie artistique, dans chacun des plis de la Galerie Le Manège, qui ferait quasiment songer à la reconstitution de la mythique cour de l’inclassable Joe Ouakam. Presque, en plus ordonné, peut-être un peu trop, sans doute parce que nous ne sommes pas vraiment au 17 de la rue Jules Ferry.
Mais peu importe…Car il est là Joe, assis au milieu de cette salle où l’on entre presque sur la pointe des pieds, avec la bénédiction du préposé à la sécurité qui joue les guides, de circonstance, dirait-on, mais certainement pas de pacotille. On le sent même assez passionné. «C’est lui l’artiste» dit-il en pointant du doigt le portrait de Joe Ouakam, juste à l’entrée de la galerie, réalisé à sa façon par le plasticien Pascal Nampémanla Traoré, proche de l’artiste, qui s’est donc amusé à le façonner ou à le dessiner, à l’aide de mots écrits en noir au cachet, qu’il faut savoir retrouver dans le «texte» labyrinthique, dans la fumée de sa pipe, etc. Avec dans le désordre, Joe Ouakam, lutte, liberté, ou Agit’art, du nom de ce laboratoire animé par Joe Ouakam, dès les années 70.
Le guide du jour ne se lasse pas, puisqu’il finit par dire, quelques petites minutes plus tard, que le portrait est très ressemblant, que l’artiste s’appelait «Joe Ouakam, alias Issa Samb» ; le lapsus est révélateur. Notre interlocuteur poursuit : «Il habitait la rue Jules Ferry, mais il est né à Ouakam. Il est décédé au mois d’avril».
Au milieu de la salle, un Joe Ouakam plus vrai que nature, le binocle sur le nez, ce bouquin à la main (l’un des numéros de la revue «Internationale situationniste»), et cette «présence» à la fois physique et symbolique, que l’on aurait presqu’envie de toucher, pour la sentir respirer. Réalisée par Claire Lamarque, la sculpture est presqu’aussi inaccessible que pouvait l’être (en apparence) Joe Ouakam.
Plus vrai que nature
Entre nos regards et lui, cette implicite barrière faite de piles de journaux. Aux pieds de l’artiste, assis dans son fauteuil comme sur un trône, vêtu d’un grand manteau bigarré façon patchwork, et d’un pantalon retroussé, une drôle de poudre blanche. Ni faux sable fin, ni fausse neige. «C’est de la farine» dit le guide, qui explique que la petite clôture, c’est justement pour que les visiteurs n’aillent pas mettre de la farine un peu partout dans la galerie. Ou alors chercherait-on tout simplement à nous dissuader, à nous empêcher de franchir le petit mur en papier.
Il faut dire que du papier, il y en a dans chacun des recoins de la galerie. Ces piles de journaux dont il était devenu inséparable, du papier jauni par le temps, décoloré, poussiéreux, parfois froissé…Ces piles de journaux roulées en boule, disposées comme une échelle le long du mur, ou en croix, comme les précieuses reliques d’un archiviste-collectionneur pas très conventionnel…
Sans parler des vieilles toiles défraîchies de cet artiste pas comme les autres, qui avait réussi à façonner des personnages au regard vitreux, presqu’aussi étranges que lui pouvait l’être. Sur un pan de mur, quelques mots d’affection adressés à un «Papa Joe» écrit au milieu de gribouillis colorés, faits de formes serpentines. Le guide raconte encore : «Il paraît que sa maison appartenait (en fait) à un ami dont les enfants ont fini par la vendre. C’est dommage. Que ferons-nous après cette exposition si on nous demande où est sa maison ?»
Un peu comme si cette exposition-là, «Alem L’A-venir», qui va jusqu’au 12 novembre prochain, devrait justement servir à le garder en vie, à défaut de la cour, comme une pierre tombale, comme une sépulture sinon comme un musée. Comme un pied-de-nez au temps...
«Alem, disent les commissaires d’exposition Delphine Calmettes et Ican Ramagelli, c’est une mappemonde, une nouvelle géographie du visible et de l’invisible dressée par Joe qui nous indique la voie d’un ailleurs, d’un A-Venir, d’une transmission, d’un après.»

Autres actualités

03 - Août - 2018

Fallou Dieng :"La musique sénégalaise est devenue une affaire de rue’’

La pratique de la musique "est devenue une affaire de rue" au Sénégal, déplore le chanteur sénégalais Fallou Dieng, dont la carrière semble...

02 - Août - 2018

Laity Ndiaye : l’écrivain poète devenu instituteur de brousse

Enseignant et poète, Laity Ndiaye procède ce 8 août à la cérémonie de dédicace de son recueil de poèmes «Journal d’un...

30 - Juillet - 2018

RETOUR SUR SAINT-LOUIS JAZZ, CUVEE 2018 - JULIA SARR, CHANTEUSE D’AFRO-JAZZ JEUX D’OMBRES ET DE LUMIERES, AU PROPRE COMME AU FIGURE…

Son joli timbre de voix est fragile, il est cristallin, il sourit comme il sanglote, vous émeut comme il vous apaise. Lorsqu’il vous parle d’Humain, le Divin n’est jamais...

27 - Juillet - 2018

Théâtre : L’actualité au cœur du 14e festival «Kaddu Yaraax»

Lancée samedi dernier, la 14e édition du festival de la compagnie théâtrale «Kaddu Yaraax» a été clôturée hier. Une manifestation...

26 - Juillet - 2018

PREMIERE EDITION DU JAZZ FESTIVAL POUR LE RAYONNEMENT DE LA CULTURE SENEGALAISE

Les acteurs de l’industrie musicale (Aim) organisent, du 7 au 8 décembre prochain le «Jazz Festival» à Dakar et les 14 et 15 décembre à Diamniadio....