Film "Frontières" : Apolline Traoré sensibilise sur le droit de circuler librement

21 - Septembre - 2017

La réalisatrice burkinabé Apolline Traoré, dont le film "Frontières" a ouvert, mercredi, la 4e édition du festival "Ciné droit libre" à l’Institut français de Dakar, dit s’adresser surtout aux "populations qui ont des droits à défendre" concernant la libre circulation en particulier.

Son troisième long métrage "Frontières" (90 minutes), réalisé en février dernier, est une "road movie" qui traverse l’espace de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Un périple à bord d’un mini-car ou bus selon les cinq pays traversés : Sénégal, Mali, Burkina Faso, Bénin et Nigeria où quatre femmes se rencontrent (deux commerçantes et autant de jeunes filles) et subissent les tracasseries de la route.

Un voyage périlleux de sept jours à la fois comique, touristique, mais surtout dramatique, rythmé de viol, de vol, de corruption, d’accidents, de braquages, de mort.

Les femmes y paient un lourd tribut, car l’une d’elles sera tuée par des coupeurs de route.

"Je m’adresse surtout à la population pour lui dire qu’elle a des droits, en faisant ce film. Si les spectateurs, les commerçantes, les citoyens sortent de là (de la projection) en disant : +Ah ! Finalement, j’ai des droits, je peux me défendre+, j’aurais gagné", déclare la réalisatrice à la fin de la projection.

Selon elle, les commerçantes ou les citoyens qui subissent ces tracasseries sont "illettrés" et "ne connaissent pas leurs droits".

Apolline Traoré ne prétend pas pour autant changer les choses avec son film très réaliste.

"Je ne peux jamais prétendre que mon film va changer les choses au niveau des institutions et des gouvernements, c’est me voiler la face. Parce que ces institutions savent ce qui se passe à la frontière, ils connaissent ces problèmes de tracasseries, de corruption", fait-elle valoir.

La réalisatrice a eu des ennuis pour filmer au Nigeria tout comme l’une de ses actrices, une Sénégalaise qui s’est vu refuser l’accès à ce pays, car ne détenant comme document d’identité qu’une carte d’identité de la CEDEAO. "Le Nigéria est un autre continent", dit Apolline Traoré en ironisant.

"Ils [les Nigérians] font les choses à leur manière, comme ils veulent, et parfois, il faut contourner leurs lois. Parce qu’ils ont refusé que l’on traverse pour filmer chez eux, j’ai du mettre le drapeau au Bénin et reconstituer le Nigeria pour filmer", déplore-t-elle.

Le film "Frontières" parle ainsi de droits et d’immigration au sein de l’Afrique, comme le festival de cette année, dont le thème général est "Migrations", précise Abdoulaye Diallo de "Ciné droit libre".

Pour le représentant du garde des Sceaux, ministre de la Justice, Thié Yacine Fall, "le phénomène migratoire constitue un des enjeux majeurs pour la paix dans le monde".

L’ambassadeur de France au Sénégal, Christophe Bigot, rappelle que "la France entend porter ces valeurs des droits de l’homme".

"Nous n’avons pas le monopole, ce n’est pas parce qu’en 1789 nous avons en quelque sorte cristallisé ces concepts, que nous devons nous en sentir propriétaires. La beauté des droits de l’homme, c’est leur universalité, ce sont tous les Etats qui ont signé par exemple le Pacte sur les droits civiques et politiques de 1966", dit-il.

Les discussions sur les "Migrations" se poursuivront avec les projections d’une dizaine de films le temps du festival.

Ce sera dans plusieurs endroits de Dakar, notamment, à la prison des femmes de liberté 6 (jeudi), à Guédiawaye (vendredi), au complexe Léopold Sédar Senghor de Pikine et au Ghoethe Institut (samedi).

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