Gilets jaunes : Une nouvelle forme de contestation

25 - Mars - 2019

L’actualité vient de mettre une nouvelle fois la capitale française, sous les feux des projecteurs avec ce qui s’est passé au cours du week-end lors de la dix-huitième manifestation des « gilets jaunes ».
Si je souhaite en parler c’est pour dire les dangers d’un conflit social mal
maîtrisé. Petit rappel, tout a commencé en novembre 2018 lors de l’occupation de nombreux ronds-points sur les routes départementales
françaises par des étudiants, artisans, salariés et retraités, hommes et
femmes confondus, d’âge variable. Celles-ci entendaient exprimer leur « ras-le-bol » à propos des augmentations répétées des taxes sur les carburants et plus largement sur la baisse de leur pouvoir d’achat.
Dans une démocratie, chacun a le droit d’exprimer son mécontentement, de manifester, surtout lorsqu’une catégorie de la population revendique plus de justice. Puis il y a eu en décembre dernier de grandes manifestations dans différentes villes telles que Paris, Toulouse, Bordeaux, Nantes, etc. Et avec elles les premiers débordements, les affrontements souvent violents avec les policiers.
Chaque samedi, depuis lors a été marqué, en particulier dans la capitale, par des défilés, certains pacifiques, d’autres non. Ce samedi 16 mars la manifestation a plutôt pris l’allure d’une insurrection, certains ont parlé « d’émeute », de « guérilla urbaine » tant il est vrai que des casseurs ont détruit et pillé de nombreuses boutiques et kiosques à journaux sur les Champs-Elysées. Il y a eu de nombreux départs d’incendies dont celui d’une succursale bancaire au cours duquel des habitants ont échappé de peu à la mort. On a même entendu des « ultra-jaunes » comme on désigne les gilets jaunes les plus radicalisés s’exclamer : « Il faut brûler les riches ! ».
De l’avis d’observateurs, jamais la France, même en mai 1968, n’avait connu de telles violences populaires depuis la fin de la deuxième guerre mondiale et on a l’impression qu’une nouvelle guerre des classes renaissait alors qu’on la croyait enterrée depuis la fin du communisme et la chute du mur de Berlin.
Aujourd’hui il est difficile d’estimer le coût de la facture économique et
sociale : réparation des dégâts aussi bien pour la ville de Paris que pour les commerçants, perte d’exploitation des commerces, chômage technique pour de nombreux salariés des Champs-Elysées, etc. Bien sûr beaucoup de ceux qui étaient présents samedi place de l’Etoile et sur l’avenue, étaient des casseurs professionnels appartenant à la mouvance de l’ultra-gauche et de l’ultra-droite, aux tristement célèbres « black-block », et à une partie radicalisée de « gilets jaunes ». Il n’en demeure pas moins que dans un Etat de droit, une démocratie comme la France on doit pouvoir régler les problèmes pacifiquement, autour d’une table de négociations avec le gouvernement.
Mais il faut croire que la somme des difficultés non résolues depuis plus de trente ans ne permet plus le dialogue et que les pouvoirs publics comme les pouvoirs intermédiaires ont perdu toute crédibilité. « Seule la violence permet de se faire entendre et d’obtenir quelque chose » disent les manifestants.
Cela doit nous faire réfléchir car le Sénégal n’est pas à l’abri de ce genre de situation. L’impatience d’une population, face aux inégalités, commence par gronder et à défaut d’être entendue finit par se rebeller.
Et il devient alors très difficile de canaliser la colère d’une foule de manifestants qui estiment n’avoir plus rien à perdre. Le prochain gouvernement du Sénégal serait bien inspiré de tirer des enseignements de ce qui se passe en France s’il ne veut pas être confronté un jour à une situation semblable, ingouvernable, car les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets. Une chose est sure, je ne voudrais pas que mon pays et mes concitoyens connaissent un tel climat insurrectionnel dont on ne sait jamais comment cela peut se terminer : par des morts ? l’instauration d’un régime autoritaire ? Et pourtant la France est un grand pays, cinquième puissance mondiale. Celle-ci a toutefois été traversée dans le passé par des convulsions révolutionnaires, dont celle de 1789 sans oublier la Commune de
Paris et sa semaine sanglante en 1871. Il y a ainsi des ferments qui ne demandent qu’à ressurgir à certaines époques, y compris l’époque moderne et nulle nation n’est à l’abri de troubles sociaux qui peuvent dégénérer en insurrection populaire. La conclusion à tirer des évènements insurrectionnels de Paris c’est que la violence ne mène à
rien dans une démocratie sauf à la désolation. Seuls le dialogue et le débat d’idées permettent de débloquer une situation.
Nous n’empêcherons pas certains individus, plus radicaux de privilégier leurs poings à la parole, de vouloir détruire, piller, casser telles les hordes d’anciens barbares, mais ces gens, une infime minorité, sont la lie d’une société civilisée et il faut les empêcher de nuire grâce à l’arsenal législatif dont dispose légitimement le pouvoir démocratiquement élu. Il en a le devoir car le droit à la sécurité est un droit essentiel des peuples. En écrivant cela je pense à ce que disait Einstein : « Deux choses sont infinies, l’univers et la bêtise humaine. Mais pour l’univers, je ne suis pas encore complètement sûr ».

Ibrahima Thiam, Président d’un AUTRE AVENIR

Autres actualités

09 - Octobre - 2019

Rapprochement Macky Sall/Abdoulaye Wade : Ces chefs d’Etat, facilitateurs

Après Alpha Condé et François Hollande, les facilitateurs du «Protocole» de Conakry, d’autres chefs d’Etat ont joué leur partition dans le...

09 - Octobre - 2019

Khalifa Sall à Kaolack : « On n’a pas tendu l’autre joue, mais on a oublié… »

Lors de sa visite à Kaolack, Khalifa Sall a tenu à remercier les Kaolackois pour leurs prières. « Nous rendons grâce à Dieu pour sa miséricorde et...

09 - Octobre - 2019

Me Assane Dioma Ndiaye : "Il faut aux avocats des arguments juridiques pour défendre les dossiers plutôt que de mobiliser l'opinion publique seulement"

La sortie de l'Ordre des avocats pour mettre en garde les avocats des différentes parties dans l'affaire dite des 94 milliards, ne laisse pas indifférent l'avocat Me Assane Dioma...

08 - Octobre - 2019

Nomination du Dg de l'Ipres : Macky Sall recule…

La nomination du nouveau Directeur général de l'Ipres, Amadou Lamine Dieng, par décret présidentiel, suscite une vague de contestations tous azimuts. Face...

08 - Octobre - 2019

Nomination du DG de l’Ipres par décret: Mademba Sock désapprouve la décision de Macky Sall

Le secrétaire général de l’Union nationale des syndicats autonomes du Sénégal (Unsas), Mademba Sock a désapprouvé la décision du...