GRÈVE – Le Sytjust paralyse Thémis : LES USAGERS CONDAMNÉS – Impossible d’obtenir un quelconque document de justice

09 - Octobre - 2018

Les demandeurs de casiers judiciaires et autres papiers au Tribunal souffrent énormément de la grève du Syndicat des travailleurs de la justice (Sytjust). Ils invitent l’Etat au respect des engagements pris et exhortent aussi les grévistes à penser à assurer le service minimum.
Le Syndicat des travailleurs de la justice (Sytjust) a encore commencé, ce lundi, à observer 72 heures de grève. Une situation aux conséquences énormes pour les justiciables et autres usagers de la justice. Hier matin, devant l’annexe du Palais de justice de Dakar, un décor inhabituel s’offrait aux visiteurs. D’habitude, l’endroit grouille de monde. Ils viennent des coins et recoins de Dakar pour chercher des casiers judiciaires ou encore légaliser un certificat de nationalité. Mais hier, il était impossible de disposer de ces précieux papiers. Peu de gens étaient présents sur les lieux. Les portes fermées. La chaleur dictait sa loi. Les vendeurs de journaux et de crédit téléphonique, eux, guettaient l’arrivée de probables clients.
Le découragement se lisait sur le visage de Khadidiatou Gloria Diallo. Cette jeune dame de taille courte a quitté Jaxaay pour rien. Elle avait besoin d’un certificat de nationalité pour le dépôt de son passeport. Voilà la deuxième fois qu’elle apprend avec surprise que le service est paralysé. Du temps, elle en a perdu. Mais aussi de l’argent pour avoir payé 1 000 francs Cfa, chaque jour, pour le transport.
«C’est un pays de m…. Je suis désolé pour mon pays, mais on n’avance pas. C’est du n’importe quoi. On a droit à ça. Ils ne doivent pas fermer les portes comme ça. Je ne suis pas content. Je suis très déçu», crache Ousmane Ba. Engoncé dans un boubou traditionnel, derrière ses lunettes noires, cet usager a eu du mal à cacher sa colère dans un accent qui ressemble à celui d’un petit Parisien. Devant l’impossible, il est finalement rentré chez lui à Sangalkam sans son casier judiciaire qu’il était venu chercher.
C’est le même sort qu’a subi cette étudiante qui s’est déplacée pour légaliser son certificat de nationalité. Sous l’anonymat, elle a expliqué qu’elle doit postuler pour le concours d’entrée à la gendarmerie. Elle est retournée chez elle dans l’espoir d’obtenir ce document jeudi prochain, avant la date limite prévue ce 15 octobre. «Ce mouvement nous porte péniblement préjudice parce que ça fait deux semaines que je viens ici. Je dois passer le concours de l’Administration pénitentiaire dont la date limite pour les dépôts était prévue pour le 13 octobre. On n’arrive pas à remplir toutes les formalités», ajoute un autre qui a préféré taire son nom. Après le report de la date de dépôt au 13 octobre, dit-il, «je serai obligé d’aller à la direction pour savoir si la date limite est maintenue ou ça dépend de la grève». Il craint que la grève ne se poursuive jusqu’à cette date. Raison pour laquelle il appelle l’Etat à «prendre au sérieux les revendications des syndicats parce que ce n’est pas la première fois qu’on assiste à ce genre de mouvements d’humeur. C’est valable pour le secteur de la santé, de l’enseignement. Donc, il appartient à l’Etat de veiller au respect des engagements pris avec les syndicalistes».
Une semaine de grève, c’est trop aux yeux de Cheikhou Diakhaté qui voulait un casier judiciaire. L’homme en veut aux grévistes. Il dit : «Ça, c’est du n’importe quoi. Ça fait presque une semaine, je cours après ce papier. On me dit que les greffiers sont en grève. Je suis pénalisé parce que j’ai besoin de ce papier pour aller au travail. Je dois déposer un dossier qui est urgent. Il faut faire la grève, mais il faut respecter les gens. Ils font la grève et puis on va les payer à la fin du mois. C’est quoi ?» Pour son transport, dit-il, il a déboursé 2 000 francs Cfa entre Malika et le Tribunal de Dakar.
Le journaliste chroniqueur judiciaire, Lassana Sidibé, parle, lui, de fait inédit. Après une dizaine d’années dans le milieu judiciaire, indique-t-il, la grève de greffiers ne date pas d’aujourd’hui, mais ça n’a jamais atteint ce niveau. C’est une «crise d’autorité judiciaire. Il n’y a pas d’autres termes», estime-t-il. Tous ces usagers souhaitent tous que le service minimum soit assuré quand il y a grève.

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