Mansour Elimane Kane, ministre des Infrastructures : « Des autoroutes pour un aménagement équilibré du territoire »

22 - Octobre - 2016

Le programme autoroutier initié par le chef de l’Etat est en marche. En témoigne la réalisation de nombreux projets comme Aibd-Sindia qui sera inauguré lundi. L’Etat se fixe un objectif de réaliser 50 km d’autoroutes par an. Ce programme va de pair avec une dynamique de réalisations d’infrastructures routières structurantes à travers tout le pays afin dé faciliter davantage le déplacement des populations et booster l’économie du pays. Dans cette interview, le ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, Mansour Elimane Kane revient sur les grandes orientations en la matière.

Y a-t-il une stratégie en termes de projets autoroutiers ? Et quel bilan faites-vous des réalisations autoroutières depuis 4 ans ?
Le Sénégal, dans le cadre de sa politique de renforcement et de sauvegarde du réseau routier principal, développe un important programme autoroutier décliné dans le Plan Sénégal émergent (Pse) qui fixe les ambitions du Gouvernement en termes de politique économique et sociale. Le développement du réseau autoroutier va favoriser un déplacement rapide des biens et des personnes entre les principales agglomérations et les grands pôles de développement. Il rentre dans le cadre d’un aménagement équilibré du territoire. Ce réseau de transport moderne, sûr et rapide, est le support du développement économique et social du pays.

Le réseau autoroutier compte aujourd’hui une section non concédée de 7 km entre l’avenue Malick Sy et la Patte d’Oie ainsi qu’une section de 42 km entre la Patte d’Oie-Diamniadio et l’aéroport Aibd concédée à la société Senac Sa. Une section reliant Aibd à Mbour est également en construction. Elle est achevée sur sa partie Aibd-Sindia qui sera mise en service à partir du lundi 24 octobre 2016, après son inauguration par le chef de l’Etat. Cette section, comme celles reliant Aibd à Thiès, puis à Touba, est construite sous maîtrise d’ouvrage publique. Le financement est assuré par des prêts de la China Eximbank à l’Etat à des conditions concessionnelles avec une contribution financière de l’Etat. En résumé, avec la mise en œuvre de tous ces projets, nous sommes dans une dynamique d’atteinte de l’objectif stratégique décliné par Son Excellence Monsieur le président de la République, à savoir la réalisation de 50 km d’autoroutes par an. Grâce à la réalisation des tronçons autoroutiers Diaminiado-Aibd (17 km), Aibd-Sindia (19 km), Aibd-Thiès (16 km), Thiès-Touba (113 km) et Thiès-Thiénaba -Tivaouane (21 km), le Gouvernement du Sénégal aura construit 186 km d’autoroutes entre 2012 et 2019. En 2025, ce réseau autoroutier sera porté à 520 km et notre pays sera nettement en avance sur les autres pays de la sous-région.

Quel est l’impact sur le Programme du chef de l’Etat, les bénéfices sur les plans local, national et sous-régional ?
La réalisation de ces autoroutes a amélioré considérablement la mobilité urbaine et a agi positivement sur les activités économiques tant aux niveaux national que local. Plusieurs avantages sont aujourd’hui tirés de la réalisation de ces projets autoroutiers. L’Autoroute Dakar-Diamniadio-Mbour-Thiès constitue l’un des grands projets structurants du Sénégal. Sa réalisation a permis de créer les conditions optimales pour permettre à Dakar de jouer pleinement son rôle de pôle économique. Ce programme autoroutier combiné aux orientations du chef de l’Etat sur le désengorgement de Dakar va aussi permettre une connexion rapide entre le nouvel aéroport Blaise Diagne de Diass, le pôle urbain de Diamniadio, le centre de Dakar et les villes de Mbour-Thiès et, plus tard, Touba.

Il convient également de noter que la réalisation des infrastructures autoroutières contribue grandement à la mise en œuvre des nouvelles politiques urbaines en matière de développement industriel, de logement, d’hygiène et assainissement. Enfin, il est noté une nette valorisation et une conservation du patrimoine foncier comme support au développement économique et social des zones impactées.

Des problèmes de qualité et de finition ont été soulevés sur une partie du tronçon, qu’en est-il exactement ?
Je dois d’emblée vous dire que la qualité des travaux est irréprochable du point de vue technique. Suite aux instructions de Monsieur le président de la République, toutes les autoroutes construites sous maîtrise d’ouvrage publique sont réalisées avec des standards internationaux égaux ou supérieurs à ce qui se faisait jusqu’à présent. En guise d’illustration, on peut citer les structures de chaussée qui ont été renforcées. En outre, pour des raisons de sécurité, ces autoroutes sont les seules à avoir des boucles avec bretelles à 2 voies ainsi que des ouvrages conçus en 2x3 voies pour anticiper sur l’extension future. Enfin, toutes ces autoroutes peuvent être étendues en 2x3 voies au moins. L’entreprise a pris toutes les mesures pour faire les corrections nécessaires en vue de parfaire les revêtements.

Parlez-nous de l’exploitation d’Aibd-Mbour. Sera-t-elle de gestion privée (comme les rumeurs semblent l’annoncer) ou publique ?
Le Gouvernement a fait le choix de mettre toutes les autoroutes à péage. Le produit tiré de la commercialisation de la route (péage) permettra de rembourser les prêts et couvrir tout ou partie des coûts de financement, d’exploitation et de maintenance. Ainsi, les financements contractés auprès d’Eximbank Chine auront tous peu d’impact sur le budget de l’Etat. Je voudrais à ce niveau insister sur l’implication forte du président de la République pour arriver à des tarifs acceptables pour les usagers, sans que cela n’affecte l’économie de l’autoroute à péage concédée à Senac Sa. Je dois dire que ces négociations ont été faites dans un esprit d’ouverture pour arriver à des tarifs consensuels avec la pleine coopération de la société Senac Sa. Suivant les instructions du président de la République, nous avons pu aboutir à une diminution du prix du péage pour faire bénéficier aux usagers un bonus de 800 FCfa.

En effet, le tarif normal qui devait être appliqué était de 2.400 FCfa pour un Véhicule Léger (1600+800) sur le tronçon Diamniadio-Aibd-Sindia, avant le renoncement partiel de Senac Sa. Aujourd’hui, le tarif qui sera pratiqué de 1.600 FCfa entre Diamniadio et Aibd permettra d’aller jusqu’à Sindia et, plus tard, jusqu’à Mbour, sans supplément de tarif. Ce prix est tout à fait acceptable et correspond à ce qui se fait dans d’autres pays. Enfin, l’Etat va recourir à un partenaire stratégique pour l’exploitation des autoroutes à côté du secteur privé sénégalais. Ce partenaire va travailler avec les services compétents de notre administration pour assurer une valorisation du patrimoine autoroutier de l’Etat. La Senac Sa, vu son expertise, sera un des partenaires privilégiés de l’Etat. La fonction principale de développement de futurs tronçons sous maîtrise d’ouvrage publique restera au sein du département des infrastructures.

Selon vous, qu’est-ce qui explique ce retard dans l’ouverture de l’autoroute ?
C’est vrai que la mise en service de l’autoroute était fixée au 19 Août 2016. Malheureusement, elle n’a pas pu se faire à cette date en raison de ce que je viens d’évoquer. En effet, le président de la République, toujours soucieux du pouvoir d’achat de ses compatriotes, avait instruit mon collègue chargé des Finances et moi-même de discuter avec la société Senac Sa, sous la supervision du Premier ministre, pour arriver à des tarifs acceptables pour les usagers. A la date du 19 Août, ces discussions n’étaient pas terminées, c’est ce qui justifie le report de la date d’ouverture.

Justement, les Sénégalais pensent que les tarifs sur l’autoroute Dakar-Diamniadio sont chers. Est-il envisagé une diminution des tarifs ?
Comme vous le savez, le tronçon Dakar-Diamniadio-Aibd a été concédé à la société Senac Sa pour une durée de 30 ans. Au passage, cette concession prend fin le 30 novembre 2039. Ainsi, des études économiques et financières, des études de trafic et des enquêtes sur l’acceptabilité du péage ont été effectuées et à travers les conclusions de ces différentes études, il a été établi le plan de financement des coûts d’Investissement répartis entre (i) un financement public correspondant à la subvention versée par l’Etat et (ii) un financement privé apporté par le Titulaire (Senac Sa).

Dans ce schéma de type partenariat public privé, le Titulaire est autorisé à percevoir le péage comme mode de rémunération. En contrepartie, il prend en charge le fonctionnement du système d’exploitation mis en place, notamment les coûts d’exploitation (équipements, personnel, matériel d’intervention…), les coûts d’entretien, de maintenance, et de renouvellement des différentes parties d’ouvrage et les frais financiers liés à la dette. Il faut peut-être rappeler que le péage est une redevance payée par l’usager en contrepartie de services qui lui sont rendus. Dans ce type d’infrastructures, on se déplace dans des conditions sécurité et de rapidité nettement meilleures que sur les routes classiques. Ainsi, avec moins de risques d’accidents et des temps de déplacement raccourcis, les usagers peuvent se livrer à d’autres activités économiques.

Mais pour maintenir le pouvoir d’achat des populations, l’Etat a consenti des efforts importants en accordant des subventions pour une partie du financement. Ce qui s’est traduit par des tarifs très inférieurs à ce qu’ils auraient dû être sans le concours financier de l’Etat (par exemple, plus de 30% en moins, sur le tronçon Diamniadio Sindia) au grand bénéficie des usagers. Mais, conscients que les tarifs peuvent encore paraître chers, nous sommes, sur instruction du président de la République, en train de faire une évaluation du contrat en vue d’aller vers des négociations avec Senac Sa pour la révision des tarifs actuels sur le tronçon Dakar-Diamniadio.

Qu’est-ce que l’Etat gagne en termes de recettes financières sur ce projet ?
Comme je l’ai expliqué plus haut, l’Etat ne gagne rien pour le moment sur ce tronçon contrairement aux autoroutes construites directement par l’Etat. Le mécanisme de partage des fruits ne permet pas à l’État d’en bénéficier immédiatement sur le tronçon sous concession. Par contre, au-delà des aspects financiers, les retombées économiques sont énormes. Rappelez-vous la situation de mobilité urbaine à Dakar et vers la banlieue avant la mise de l’Autoroute. Les effets des externalités négatives induites par la congestion paralysante de la circulation à Dakar, étaient estimés à près de 100 milliards de FCfa par an. Aujourd’hui, les déplacements entre la banlieue et Dakar se font en mois d’une heure alors qu’il fallait mettre 3 ou 4 heures pour effectuer le même trajet. Sans compter, les emplois créés par le projet et le remembrement des quartiers inondables où vivaient des populations, en détresse, qui fort heureusement ont été relogées dans des zones de recasement où ils s’adonnent à une vie économique et sociale normale.

Quelles sont les perspectives de réalisation d’ici 2017 ?
Le programme autoroutier sera poursuivi. L’objectif du chef de l’Etat est d’étendre le programme autoroutier jusqu’aux frontières avec les cinq pays voisins, avec une valeur cible d’au moins 50 Km d’autoroutes construites par an. Le projet autoroutier Mbour-Fatick- Kaolack (120 km) et le projet d’autoroute qui longe la côte de Dakar à Saint-Louis sont en phase d’études. Cette autoroute côtière Dakar-Saint-Louis aura un réel impact sur l’aménagement du territoire et sur le développement touristique de la grande côte. La dynamique de réalisations d’infrastructures routières structurantes va se poursuivre avec le démarrage prochain de la route Sédhiou-Marssassoum (Boucle du Boudier), Kédougou-Salémata, la dorsale de l’île à Morphile, Dabo-Médina-Yoro-Foulah, Bambey-Baba Garage, etc. Tous ces projets vont compléter la mise à niveau du réseau, avec la réhabilitation de la Nationale 2 entre Ndioum-Ourossogui-Bakel dont les travaux sont en instance de démarrage, de la Nationale 1 entre Tamba et Bakel et de la Nationale 7 entre Dialocoto et Mako.

Je dois aussi mentionner le Programme de modernisation des villes du Sénégal (Promovilles) lancé au mois de juillet passé par le président de la République lors du conseil des Ministres décentralisés de Dakar. Le Promovilles vise, entre autres, à doter les villes d’infrastructures modernes et de qualité et à améliorer le cadre de vie des populations urbaines, à l’image du Pudc qui intervient en milieu rural. Le Promovilles va entrer dans sa phase active à Dakar, Kaolack, Diourbel, Gossas avant la fin de l’année. Il sera aussi étendu à d’autres villes avec le financement additionnel attendu de la Banque africaine de développement (Bad).

Enfin pour terminer, je dois dire que le sous-secteur des infrastructures routières connaît actuellement un dynamisme fort. Beaucoup de projets prioritaires inscrits dans le Plan d’actions prioritaires seront achevés avant la fin de l’année 2016 : la route Keur Waly Ndiaye-Passy-Sokone, le pont de Kédougou, l’axe Touba-Dahra et la route Nioro-Keur Ayib à la frontière avec la Gambie. Le président de la République aura le plaisir d’inaugurer ces vastes programmes dans les prochaines semaines.

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