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Ousmane Sow Huchard, porte-étendard de l’écologie

01 - Juillet - 2020

La simple évocation du nom d’Ousmane Sow Huchard fait souvent penser à l’écologie. Le musicien, militant écologiste et ancien député, décédé mercredi à l’âge de 77 ans, faisait partie des monstres sacrés des arts sénégalais, surtout dans les années 80 et 90. Son expertise lui a valu aussi une renommée internationale.

Il portait la casquette d’un homme politique en s’affichant comme l’un des porte-étendards des questions écologiques, dans les milieux politiques sénégalais. Candidat du Rassemblement des écologistes du Sénégal (RES-Les Verts), aux élections législatives du 3 juin 2007, il avait été élu député de Ziguinchor (sud), sa ville natale.

Surnommé Soleya Mama (Le soleil de sa mère), il s’est battu pour faire de l’environnement une question centrale dans le débat politique. Même s’il n’est pas une formation pionnière dans ce domaine, le RES-Les Verts, qu’il a longtemps dirigé, a résolument mené la lutte contre la dégradation de la biodiversité.

Né le 5 décembre 1942, Ousmane Sow Huchard, anthropologue, muséologue, musicologue, critique d’art, conservateur de musée et consultant international, a d’abord reçu une formation technique en électricité avant d’entamer des études universitaires sur l’anthropologie, la musique et la muséologie, au Canada. Il était titulaire d’une licence d’histoire de l’art et d’archéologie classique de l’Université Laval, en 1978, et d’un master en anthropologie (option muséologie) de l’Université de Montréal, en 1980. Il sera titulaire, cinq ans plus tard, d’un doctorat d’anthropologie sociale et culturelle de l’Université de Laval, où il enseigne la muséologie à partir de 1981.

A son retour au Sénégal, il est nommé successivement conservateur en chef du Musée dynamique (1983-1988), conseiller technique au cabinet du ministre de la Culture (1986-1988), commissaire aux expositions d’art à l’étranger du Sénégal (1989-1990), président du conseil scientifique de la Biennale de l’art africain contemporain (Dak’Art), pendant six ans (1993-1999).

Auteur-compositeur, père de huit enfants, Ousmane Sow Huchard a été administrateur général adjoint de la Fondation Youssou-N’Dour. Sur le plan musical, il s’est illustré comme membre fondateur, en 1964, du Dakar Université Sextet, l’orchestre universitaire de Dakar. Il rejoint ensuite le Merry Makers, un groupe musical spécialisé dans l’interprétation des variétés africaines, françaises, et du rhythm and blues ou R&B.

A la suite de la scission de ce groupe, il crée le Waato Sita (il est temps, en mandingue), avec des collaborateurs, en 1970. C’est un groupe de recherches musicales implanté au centre culturel Blaise- Senghor, à Dakar. La spécificité du Waato Sita était d’allier des instruments occidentaux à des instruments africains, dont la kora mandingue, le tam-tam wolof, le ‘’bugeer’’ diola, le balafon balante et le ‘’bassé bolong’’ peul.

Ousmane Sow Huchard a été directeur du cabinet d’ingénierie culturelle ‘’Arts, actions’’, spécialisé dans le conseil, la réalisation et la production, dans les domaines de la muséologie générale, de la décoration artistique, du management d’artistes et d’artisans, etc.

Quatre ‘’solidarités fondamentales’’

Pétri d’idées écologistes, il est entré en politique en 1999, en créant avec d’autres militants le Rassemblement des écologistes du Sénégal-Les Verts, dont il devient le porte-parole. Un parti politique qu’il conduit aux élections législatives de 2001, sans obtenir de siège à l’Assemblée nationale.

Le parti écologiste fonde son idéologie sur quatre ‘’solidarités fondamentales’’ : la solidarité avec les animaux, la nature et le système écologique, la solidarité avec les générations futures, la solidarité avec tous les peuples du monde, et solidarité avec tous les Sénégalais. Ces derniers vivent sous la menace de la précarité, de la pauvreté et de l’exclusion, disait Ousmane Sow Huchard à l’APS en 2007.

Cinq ans auparavant, sous sa direction, les écologistes remportent une cinquantaine de sièges aux élections locales (les conseils ruraux et régionaux, aujourd’hui dissous, et les mairies), dans plusieurs collectivités, notamment dans les îles de Gorée et de Ngor, situées près de Dakar.

En 2004, le RES-Les Verts est secoué par une crise. Ousmane Sow Huchard, accusé d’usurpation de fonctions par certains responsables, est suspendu, puis exclu des instances du parti. Ne l’entendant pas de cette oreille, il prend à son tour des sanctions contre neuf membres qu’il considère comme des dissidents, dont Haïdar El Ali, écologiste de renom, nommé ministre de l’Environnement huit ans plus tard. Ils sont exclus pour absentéisme chronique aux réunions, laxisme et refus de versement des cotisations mensuelles.

Le différend est porté devant le tribunal Hors Classe de Dakar, où Ousmane Sow Huchard est traduit par une citation directe pour usurpation de fonctions et d’autres accusations. Mais la requête des plaignants est jugée irrecevable.

Très impliqué dans le mouvement associatif, il est membre de plusieurs associations professionnelles nationales et internationales : l’Association des chercheurs sénégalais, le Conseil international des musées de l’Unesco, l’Association internationale des critiques d’art, l’Association des métiers de la musique du Sénégal. Il a dirigé l’Association pour la promotion de la musique africaine traditionnelle.

Ousmane Sow Huchard a obtenu plusieurs distinctions : Chevalier de l’Ordre national du lion (Sénégal) et Chevalier de l’ordre des arts et lettres (France et Sénégal).

Il est également auteur de nombreux essais, dont ‘’La Kora : objet témoin de la civilisation mandingue’’ (Presses universitaires de Dakar). L’auteur-compositeur sénégalais revendiquait la composition de l’hymne de l’ex-Organisation de l’unité africaine. Un hymne utilisé pendant dix ans par le Conseil supérieur du sport africain. Les hymnes ‘’Jeunesse sans frontières’’ et de la Semaine nationale de la jeunesse étaient de lui, a-t-il dit à l’APS.

A l’Assemblée nationale, où il a siégé durant la législature 2007-2012, Ousmane Sow Huchard disait vouloir prêter ‘’une oreille plus attentive [aux] compatriotes paysans, ouvriers, créateurs, artistes, artisans, inventeurs, chercheurs et femmes au foyer’’.

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