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Qui était Ousmane Tanor Dieng

16 - Juillet - 2019

Un homme public de grande envergure disparait de la scène politique sénégalaise avec le décès lundi du secrétaire général du Parti socialiste (PS, majorité), Ousmane Tanor Dieng, rappelé à Dieu en France à l’âge de 72 ans, des suites d’une maladie.

M. Dieng, nommé président du Haut Conseil des collectivités territoriales par Macky Sall, institution qu’il dirigeait de 2016 à sa mort, comptait parmi les plus fidèles alliés politiques du chef de l’Etat sénégalais dont il avait fini par être un solide soutien, progressivement à partir de l’accession de ce dernier à la magistrature suprême à partir de 2019.
Ousmane Tanor Dieng doit à ce soutien à Macky Sall une grande partie de ses inimités politiques de ces dernières années, le PS, sous ses ordres, s’abstenant de présenter un candidat à la magistrature suprême, comme lors de la présidentielle de février dernier, histoire de privilégier son alliance avec le président sortant, en lice pour un second mandat.
Une option qui a contribué à accentuer les dissensions internes à son parti, mais Ousmane Tanor Dieng s’en tenait toujours à cette position, avec ses alliés et plus fidèles partisans, contre vents et marées, malgré les critiques de plus en plus dures de ses détracteurs dont le nombre augmentait à mesure que quelqu’un comme l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall, gagnait de la sympathie dans l’opinion et se présentait en candidat potentiellement sérieux à la présidence de la République.
Il devenait alors facile pour les partisans de Khalifa Sall – condamné à cinq ans de prison en mars 2018 pour escroquerie sur deniers publics – de voir derrière les déboires judiciaires de ce dernier la main noire du secrétaire général du PS, opposé à une candidature socialiste à la présidentielle dans ce contexte d’alliance avec le pouvoir, contrairement à l’ancien édile de Dakar, qui revendiquait le soutien de larges franges du parti.
Celui qui entama son service au sein de l’administration sénégalaise comme conseiller chargé des affaires internationales au ministère des Affaires étrangères (1976-78), à sa sortie de l’Ecole nationale d’administration, a pour cela de qui tenir, en la personne du premier président sénégalais Léopold Sédar Senghor dont il fut le conseiller diplomatique (1978-1981).
Senghor, chantre de l’organisation et de la méthode, a inspiré chez Ousmane Tanor Dieng le sens de l’Etat et le goût de l’exacte mesure des choses, toutes choses qui n’ont que peu de rapport avec les excès, y compris politiques.
Une qualité sans doute perçue par Abdou Diouf, successeur de Léopold Sédar Senghor auprès de qui Ousmane Tanor Dieng a également assumé les fonctions de conseiller diplomatique (1981-1988), avant d’être nommé directeur de cabinet, puis ministre-directeur de cabinet, poste qu’il occupera jusqu’en 1993, année où il est nommé ministre d’Etat, ministre des Services et des Affaires présidentiels.
Cela faisait qu’Ousmane Tanor Dieng était craint, adulé et courtisé pour sa toute-puissance supposée au sein du pouvoir. Il était vu comme celui qui faisait et défaisait les destins, une légende nourrie de fantasmes les plus divers, en partie liés à sa grande discrétion, surtout en ce qui concerne la conduite des affaires de l’Etat.
Le sens du compromis du défunt – de la compromission disent ses détracteurs -, lui a été d’un grand apport, spécialement à partir de 2000, quand il a fallu prendre les rênes du PS après sa défaite à la présidentielle de cette année-là, dans un contexte d’alternance politique marqué par plusieurs éléments du PS.
Beaucoup ont quitté le navire du PS, mais Ousmane Tanor Dieng a tenu bon avec détermination, misant sur la fin de la tempête politique, le courage et la détermination des militants qui resteraient. Il peut même se prévaloir d’avoir transformé en sa faveur une situation mal engagée au départ, contribuant à une opposition républicaine sous Abdoulaye Wade, mentor et prédécesseur de son allié Macky Sall.
Raillé pour son manque de charisme, Ousmane Tanor Dieng aura l’occasion de faire valoir ses capacités de tacticien politique, son expertise même, en servant de catalyseur, avec d’autres leaders politiques bien sûr, à la dynamique d’opposition ayant conduit au lancement des Assises nationales du Sénégal, conduites entre le 1er juin 2008 et le 24 mai 2009, au plus fort de la contestation du pouvoir du président Wade.
Il en a gagné en retour une certaine légitimité politique, quelque chose venu définitivement clore le congrès controversé dit sans débat de 1996, à l’issue duquel il fut imposé par Abdou Diouf comme premier secrétaire du PS, au grand dam de ses challengers, lesquels n’ont eu de cesse d’affirmer que cet épisode avait précipité la chute du PS, le 19 mars 2000, et sa traversée du désert après 40 ans de pouvoir.
La suite du parcours politique d’Ousmane Tanor Dieng est bien connue. Il fut candidat à la présidentielle en 2007 et en 2012, sans vraiment réussir à faire adhérer grand nombre à son idéal politique, deux échecs répétés qui conduisent le secrétaire général du PS à un certain réalisme.
Il soutenait Macky Sall au second tour de la présidentielle de 2012 et était l’un de ses plus importants alliés au scrutin présidentiel du 24 février dernier.
Dans un message de condoléances rendu public à l’issue de son décès, Macky Sall lui a bien rendu ce soutien quand il salue notamment « un homme d’Etat d’une dimension exceptionnelle », témoignage aussi d’un parcours pas toujours compris, mais qui était soumis aux exigences de la République et de l’Etat.
« Le Sénégal vient (…) de perdre un homme d’Etat d’une dimension exceptionnelle, un digne fils de la République dont le parcours constitue un exemple d’abnégation et un modèle d’engagement patriotique », écrit le président Sall.
« Avec la disparition du président Ousmane Tanor Dieng, le président Macky Sall, la coalition Benno Bokk Yaakaar, le Parti socialiste et la République viennent de perdre un allié éminent et loyal, un grand militant du Sénégal, et la République un de ses plus grand serviteurs », conclut-il, avant de formuler des prières « les plus ferventes pour qu’Allah l’accueille au paradis ».

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