Relations toujours heurtées entre pouvoir et opposition : le parrainage a fédéré les forces contre Macky

12 - Avril - 2018

Le projet de loi sur le parrainage, conçu par Macky et qui impose au moins 65 mille signatures pour chaque prétendant à la magistrature suprême, est le prétexte tout trouvé entre pouvoir et opposition d’anticiper la présidentielle.

Décidemment, 2019, c’est bien loin et les états-majors politiques sont tellement pressés d’en découdre que cette généralisation du parrainage aux partis, par modification de la loi constitutionnelle, offre ainsi l’occasion rêvée d’en découdre, ici et maintenant.

L’opposition rêve d’un 23 juin bis, appuyée en cela par des mouvements comme Y’en a marre. Même si les partis politiques ou coalitions travaillent séparément à créer les conditions d’un retrait du projet de loi, l’objectif reste le même : Discréditer le projet, son initiateur et braquer l’opinion contre lui.
Et Macky n’a pas encore, malgré les médiations entamées, fléchi dans sa volonté de faire voter la loi.

Nous sommes en train de vivre les prémisses d’un scénario à la togolaise où l’opposition exige un retour à la Constitution de 1992 et que le pouvoir fait la sourde oreille.

En conséquence, si l’on n’y prend garde, nous allons avoir le même scénario que ce qui se passe actuellement au Togo, avec une crise politique dont les fondements résident dans le choix des textes à appliquer pour aller à des élections.

En tout cas, toutes les coalitions politiques de l’opposition sont actuellement sur le pied de guerre. L’Initiative pour des élections démocratiques (IED) est dans la même dynamique que Y’en a marre qui reprend du service.

Si les autorités minimisent cette volonté d’aller vers un 23 juin bis, le pays risque de traverser une période de tension grave dont les conséquences pourraient être regrettables.

Le manque de dialogue entre pouvoir et opposition, l’emprisonnement de Khalifa Sall et l’exil de Karim, la non-matérialisation de certains points du référendum, l’affrontement permanent par médias interposés entre états-majors politiques, la polémique sur les propos du Ministre de l’Intérieur, les dysfonctionnements sur la confession et le retrait des cartes d’électeurs sont autant de motifs de frustrations qui, néanmoins, n’avaient pas encore réussi à fédérer les forces contre le Président de la République.

Aujourd’hui, c’est apparemment le cas avec le parrainage. L’opposition craint un coup fourré du pouvoir qui pourrait en profiter et recaler certains candidats sans possibilité de le repêcher.

Cette classe politique qui ne fait pas confiance au Conseil constitutionnel, encore moins à l’Exécutif, compte remuer ciel et terre pour que ce projet ne passe pas.

C’est pourquoi, compte tenu de sa casquette de Chef de l’Etat-gardien de la Constitution et régulateur des intuitions, Macky pourrait revoir son projet de loi. Nous savons qu’il peut en découdre et aboutir à ce qu’il veut, mais à quel prix ?
S’il ne s’agit en effet que de la limitation du nombre des candidats, la caution de 65 millions est assez dissuasive pour que le spectre des législatives ne se reproduise pas. Qui a 65 millions à bazarder ? Les candidats seront limités d’autant plus que pour les indépendants, le parrainage a toujours existé.

A moins qu’il n’y ait un autre dessein, le recul serait une marque de grandeur pour le Président de la République qui aura tenu compte de l’opinion d’une bonne partie des acteurs politiques et de la société civile.

Wade a reculé le 23 juin sous la pression populaire et c’est cela qui serait dangereux. Le contrecoup en termes de communication sera négatif pour un régime que le peuple pousse à adopter des revirements de ce genre.

Si le pouvoir actuel s’entête, il en portera, aux yeux de beaucoup, la responsabilité des troubles qui ne manqueront pas de subvenir.

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