1967-2017 Guédiawaye, hors des clichés : « Citizen Michel » au service de sa société

06 - Octobre - 2017

Orphelin à la fin de l’adolescence, quelques années plus tard, le choix d’arrêter des études universitaires pourtant prometteuses « pour s’occuper de la maman » était une évidence. Devenu enseignant dans l’Elémentaire, Michel Mendy fait du don de soi et de l’engagement citoyen son crédo. Michel est citoyen engagé à Guédiawaye. « Citizen Michel », dirait-on de l’autre côté de l’Atlantique.
Orson Wells, le réalisateur américain, a popularisé Citizen Kane aux Etats-Unis grâce au film éponyme. Le cas de celui qu’on peut appeler « Citizen Michel » sera un jour, peut-être, mis sous l’objectif d’un cinéaste de la trempe de ceux qui devancent les livres d’histoire. En attendant, il poursuit son œuvre. Michel Mendy, à l’état civil, est coordonnateur de la société civile de la section de Guédiawaye, secrétaire général de l’association « Les vendredis du livre », moniteur éducatif, encadreur de colonie de vacances, des activités pour enfants dont les parents sont démunis et de cours de renforcement.
Autant de casquette qui sied à la tête bien posée de Michel Mendy, jeune quadra qui a l’air d’en avoir beaucoup moins. Arrivé à Guédiawaye en 1993 en provenance de Grand Yoff, Michel y cultive un engagement citoyen depuis l’enfance. « Citizen Michel » était président de l’amicala des élèves au collège et il en était membre au Lycée de Guédiawaye. « Ce sont les sollicitations de toute part qui nous poussent vers les actions citoyennes en leur faveur. A Guédiawaye, certaines personnes n’ont pas les ressources nécessaires pour apporter des solutions aux principaux problèmes qui se posent à elles ». C’est sur ce substrat que se fonde une démarche « citoyenne et totalement désintéressée ».
« Lire, c’est boire et manger. L’esprit qui ne lit pas maigrit comme le corps qui ne mange pas », estimait Victor Hugo. C’est une conviction qui n’est pas ennemi de la vérité pour Mamadou Camara, l’auteur de nouvelles, ainsi qu’une trentaine de personnes - dont Michel - qui se réunissent tous les vendredis après-midi au foyer de la commune d’arrondissement de Wakhinane-Nimzatt au nom officiel de centre de formation et d’animation professionnelle. C’est un club d’échanges et de lecture sur des thèmes divers avec généralement un invité central qui vient évoquer son rapport avec les livres et la lecture. « Tout est parti d’un constat : nous n’avons pas de bibliothèque dans notre ville, raconte Michel Mendy. Après avoir lancé un appel qui n’a pas trouvé d’écho favorable chez les autorités locales, la décision a été prise de se rassembler et de collecter des livres afin de constituer une bibliothèque ». « Les vendredis du livre » existent depuis désormais deux ans.

Combat
« C’est un échange d’idées autour de la littérature », résume Mamadou Camara, dont la dernière publication, « La saison des Larmes », a remporté le prix Aminata Maïga Ka en 2016. L’écrivain ne tarit pas d’éloges sur «Citizen Michel» : « Charmant et efficace, c’est un pilier des « vendredis du livre ». Son apport à la collecte de la bibliothèque - plus de 500 ouvrages désormais - a été important. ». Citoyen engagé mais également citoyen politisé à travers la société civile dont il dirige la section Guédiawaye. Une rencontre fortuite a été déterminante. C’est au détour d’une randonnée pédestre organisée avec des amis Manjacks, au nom de la paix en Casamance, que son chemin croisa celui de Birahim Seck du Forum civil. « C’est en cherchant des partenaires que je l’ai rencontré, précise «Citizen Michel». Depuis, il m’a introduit dans le créneau de la société civile ». Michel est investi dans « un combat citoyen ».
A Guédiawaye, il déplore le fait que certains citoyens ne connaissent pas l’étendue de leurs droits notamment en face de l’autorité locale. « A l’approche d’une fête, par exemple, la mairie doit sortir des aides pour les populations. C’est dans le code qui administre les collectivités locales. Pour le citoyen, cela sort de la poche du maire qu’il doit presque supplier pour en disposer alors que c’est un droit. Notre devoir en tant que société civile est de faire comprendre au citoyen que c’est un ayant droit tout simplement », souligne Michel. Mais le rôle de la société civile n’est pas d’être partisan. Donc elle ne doit être ni pour le pouvoir ni pour l’opposition mais essentiellement pour les populations. « La société civile souffre d’une image brouillée car on voit souvent des mouvements dits citoyens qui, à l’approche d’une élection, se mettent à militer pour tel parti ou tel autre », regrette-t-il. Ce qui a pour principale conséquence d’instaurer la défiance des populations. « Quand on se présente comme acteur de la société civile, on nous sort la fameuse boutade d’Abdoulaye Wade. « Vous êtes des politiciens encagoulés » ».

Récompense
Mais si « Citizen Michel » n’est pas politique pour autant, il n’en est pas moins mobilisateur. Les populations ont répondu favorablement à l’appel de la société civile, entre autres, sur la sensible question de la préservation de la bande des filaos. Ces arbres, implantés tout au long du littoral de Guédiawaye, sont coupés progressivement depuis plusieurs années pour faire place à un projet immobilier.
« Nous avons poussé l’autorité locale à stopper son projet immobilier et à dialoguer avec les populations », se réjouit Michel Mendy. Il y a eu d’autres fruits de l’engagement citoyen comme la prise en charge des inondations récurrentes devant le Cem Pikine-Est. « C’est en phase d’être résolu grâce à notre mobilisation collective », retient-il. Dans le tableau de chasse de l’engagement citoyen, le fleuron de l’éducation de Guédiawaye qu’est le Lycée Seydina Limamou Laye y figure en bonne place. « La mairie de Ndiarème Limamou Laye (où se trouve le l’établissement secondaire, ndlr) voulait construire des cantines tout au long des murs du Lycée.
« Nous nous sommes mobilisés pour que le lycée ne soit pas transformé en marché, raconte Michel Mendy. Avec le collectif des professeurs de Limamou Laye, le combat a été porté jusqu’aux hautes sphères de la République. Finalement, nous avons eu gain de cause puisque toutes les cantines ont été enlevées ». C’est du concret et cela se voit. « Michel est un jeune africain du Sénégal qui croit au développement par l’action. Il est très actif et a toujours le cœur de bien faire », témoigne Yoro Niang, réalisateur, entre autres membre des « Vendredis du livre ».
Les différents engagements du citoyen Michel et d’autres membres de la société civile ont fini par être reconnus par les populations de Guédiawaye : « C’est une ville qui n’est pas au ban de la société car il s’y trouve des ressources humaines très intéressantes. Guédiawaye est une ville d’avenir ». On peut bien le croire, notamment avec les différents projets d’embellissement et pour en faire un centre d’affaires et d’éducation.

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