Au Brésil, la peur du coronavirus atteint les favelas

27 - Mars - 2020

Rosali Batista de Assis n’en revient pas. « On dirait qu’on est dans un film, c’est du jamais-vu ! », se morfond cette femme de 56 ans, habitante depuis toujours de la favela de Tabajaras, à Rio, surplombant le légendaire quartier de Copacabana. « En bas, tout est fermé, il n’y a plus personne dans la rue à part la police, qui dit aux gens de rentrer chez eux et nous empêche de travailler », poursuit cette vendeuse de sacs à la sauvette, jointe par téléphone, désormais repliée chez elle par peur du coronavirus, avec la boule au ventre… mais sans une goutte d’eau au robinet.

« L’eau est coupée depuis plus d’un mois ! Alors, dites-moi : comment est-ce que je suis censée me laver les mains toutes les heures, me protéger de l’épidémie ? », s’agace Rosali, furieuse. Privée de son maigre salaire (1000 reais par mois, à peine 182 euros), il lui est impossible d’acheter de l’eau ni du gel hydroalcoolique, et encore moins de faire les courses. « Je suis propriétaire de ma maison et la fille qui a un emploi fixe va m’aider. Mais les autres dans la favela, plus isolés, qui doivent payer le loyer et l’électricité, comment vont-ils faire ? On va vers la catastrophe », s’inquiète-t-elle.
« La main-d’œuvre de Rio »

A mesure que le Covid-19 se diffuse, la tension monte dans les mille favelas de Rio et les innombrables bidonvilles du pays, où habitent au total quelque 13 millions de Brésiliens. « Il règne un climat de peur, d’inquiétude. Les habitants ne savent encore pas comment réagir », témoigne Vania Ribeiro, vice-président de l’association des voisins de Tabajaras. « Pour l’instant, même si beaucoup essaient de se confiner, les rues restent pleines de monde. Je dis aux gens : rentrez chez vous, fermez vos boutiques. Mais ils me répondent : “Ok, mais comment je vais manger ? Comment mon fils va manger ?” Les gens ne peuvent tout simplement pas s’arrêter de travailler. C’est désespérant », poursuit-t-elle.

Dans les quartiers populaires, pandémie et crise sociale ne font qu’un. « Les habitants des favelas sont la main-d’œuvre de Rio, et servent de travailleurs informels, femmes de ménage, caissières, ouvriers journaliers, vendeurs de rue… », insiste Mme Ribeiro. Autant de professions informelles lourdement impactées par la fermeture des commerces et les restrictions de mouvement décrétées par les municipalités. Selon une étude de l’ONG Data Favela, qui a interrogé plus de 1 100 personnes dans 262 favelas du Brésil, 79 % des familles auraient déjà commencé à couper dans leur budget à cause de la crise.

Autres actualités

22 - Juin - 2018

Mexique : le Veracruz sous l’emprise du crime

Disparitions, féminicides, meurtres de politiciens, de journalistes, détournements de fonds, corruption… A la veille du scrutin présidentiel du 1er juillet,...

21 - Juin - 2018

« Ces deux dernières années, les Britanniques ont redécouvert leur attachement à l’UE »

La négociation avec Bruxelles fait ressortir une triste vérité : les grands manitous du Brexit ont ou fantasmé ou raconté des bobards, explique, dans sa...

21 - Juin - 2018

Aux Etats-Unis, les conspirationnistes voient des acteurs partout

Une éditorialiste assure que les enfants d’immigrés illégaux en rétention sont « des acteurs », alimentant les théories complotistes,...

20 - Juin - 2018

Turquie : « Dérive autoritaire et dérive de l’économie, une seule et même trajectoire ? »

Depuis quatre ans, les réformes ont été mises sous l’éteignoir. Seul compte le primat à la croissance stimulée à coup de crédit...

20 - Juin - 2018

Macron et Merkel acculés sur l’immigration

Réunis près de Berlin mardi, avant le Conseil européen des 28 et 29 juin, le président français et la chancelière allemande cherchent à recadrer...