Au Burkina Faso, les forces de sécurité démunies face aux djihadistes
Les petits monticules de sable rouge s’accumulent dans le cimetière militaire de Gounghin, à Ouagadougou. Sous le soleil de plomb, le clairon de la sonnerie au mort retentit. Les visages sont graves. Familles, camarades et chefs militaires sont venus enterrer un des leurs : un lieutenant de 31 ans tué dans l’explosion d’une mine artisanale près de Pama (est) en octobre.
Désormais, la scène est fréquente au Burkina Faso, où les attaques se sont multipliées dans le nord et l’est du pays ces derniers mois. Plus de 240 civils ou militaires ont déjà été tués depuis 2015, selon un bilan officiel à la mi-octobre. « Nous sommes fatigués de voir nos frères tomber au front chaque jour. Ça me fait mal », confie un ami du défunt à la sortie de la cérémonie. Attaques de gendarmeries, mines, embuscades : les forces de sécurité burkinabées sont en première ligne face au djihadisme sahélien.
« Missions-suicides »
« Quand j’ai intégré l’armée il y a quinze ans, je me suis engagé à sacrifier ma vie pour ma patrie. Je suis prêt à mourir tous les jours, à n’importe quelle heure, oui, mais pas bêtement… Là, on nous envoie à l’abattoir, ce sont des missions-suicides », dénonce, sous couvert de l’anonymat, un démineur de retour de la frontière malienne.
Fatigue, manque de moyens et d’effectifs, l’exaspération se fait sentir chez certains militaires, qui, malgré leur devoir de réserve, ont accepté de témoigner. « Il y a trop de risques quand on part pour déminer, il manque des tenues de protection et des voitures blindées. Souvent, il m’arrive de sortir en pick-up : c’est très dangereux, à tout moment tu peux sauter sur une bombe. Parfois, il n’y a même pas de gilets pare-balles quand on va sur le terrain », poursuit ce militaire.