Au nord de Londres, les militants du Labour effarés et meurtris par les accusations d’antisémitisme
uisa Attfield n’a pas 20 ans mais vit déjà un douloureux dilemme. Perchée sur un tabouret haut du pub The Bohemia, au cœur de North Finchley (nord-ouest de Londres), cette étudiante en biologie raconte comment, elle, la jeune juive militante du Parti travailliste, s’est fait régulièrement claquer la porte au nez par des familles juives pendant la récente campagne des élections municipales.
« C’est comme si elles m’avaient demandé de choisir entre être juive et voter Labour. C’est un choix que je ne veux pas faire et que personne ne devrait avoir à faire », lâche-t-elle dans un souffle libérateur. Elle qui a adhéré voici deux ans « parce qu’elle aime ce que représente Jeremy Corbyn » pense que le leader travailliste devrait simplement « parler à des juifs normaux » pour comprendre ce qu’ils ressentent.
Ce mercredi soir, la réunion de la section Labour de Finchley et Golders Green, la circonscription comportant l’électorat juif le plus important du Royaume-Uni, n’a pas abordé le sujet qui pourrit la vie du parti depuis le début de l’été : les accusations de complaisance envers l’antisémitisme visant Jeremy Corbyn. « Un vrai soulagement, reconnaît Phil Cohen, 69 ans, dont quarante au Labour. On ne parlait plus que de ça depuis deux mois. Nous nous sommes remis à notre tâche normale : représenter les travailleurs. »
A quelques jours du congrès de Liverpool, du 23 au 26 septembre, la section a voté une motion favorable à un second référendum à propos du futur accord sur le Brexit. « Bas salaires, logement, école, et surtout Brexit… le pays ne manque pas de vrais problèmes et on a perdu du temps pour les traiter », constate le retraité. Irrésistiblement, il revient à l’antisémitisme, le sujet qui le taraude depuis qu’en mai il a perdu son siège de conseiller municipal de l’arrondissement de Barnet.
Autour des pintes de bière, les militants qui se retrouvent pour un pot d’après-réunion.