Boko Haram au Cameroun : Yaoundé qualifie les accusations de Human Rights Watch d’« allégations hystériques »

28 - Septembre - 2017

Un rapport de l’ONG dénonce l’expulsion et l’agression depuis 2015 de plus 100 000 réfugiés nigérians fuyant les exactions de la secte djihadiste.

Camp de réfugiés de Minawao, dans l’Extrême-Nord du Cameroun, où vivent des dizaines de milliers de réfugiés nigérians fuyant les exactions de la secte djihadiste Boko Haram. Crédits : Joe Penney/REUTERS
« Une femme enceinte a perdu sa place dans la file pour recevoir sa nourriture. Quand elle a demandé à un responsable de lui laisser reprendre sa place, un soldat l’a frappée avec un gros bâton. Elle est tombée au sol et a commencé à saigner. J’ai ensuite entendu dire qu’elle était morte avant d’avoir atteint la clinique. » Dans le dernier rapport d’Human Rights Watch (HCR) intitulé « Forcés à monter dans des camions comme des animaux : expulsions massives et abus par le Cameroun à l’encontre de réfugiés nigérians », les témoignages font froid dans le dos.
Lire aussi : Le Cameroun accusé d’avoir expulsé 100 000 réfugiés nigérians fuyant Boko Haram
Dans ce document de 60 pages paru mercredi 27 septembre, l’ONG de défense des droits humains accuse le Cameroun et son armée d’avoir torturé, agressé sexuellement et expulsé de force au moins 100 000 réfugiés nigérians depuis début 2015. Entre le 23 juin et le 5 juillet 2017, HRW a interrogé 61 demandeurs d’asile et réfugiés

nigérians qui confient avoir été accusés par les militaires d’appartenir à la secte islamiste Boko Haram ou d’être « des épouses des membres de Boko haram ».
Depuis 2009, ce groupe terroriste commet des exactions au Nord-est du Nigéria forçant de milliers de Nigérians à trouver refuge au Cameroun voisin. En juin 2013, le camp de Minawao, d’une capacité d’accueil de 20 000 hommes, a été établi à l’Extrême-Nord du Cameroun. Plus de 60 000 réfugiés s’y trouvent aujourd’hui, livrés à eux-mêmes, d’autant plus que les rations alimentaires du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et autres organisations ont fortement diminué, faute de donateurs.
Lire aussi : Au Niger, Boko Haram enlève 37 femmes et « égorge » 9 personnes dans un village proche du Nigeria
En mars 2014, la secte a commis son premier attentat terroriste sur le territoire camerounais. « Jusqu’à mi-2015, les réfugiés pouvaient entrer et sortir librement du camp. Mais peu après les attaques de Maroua, les autorités locales ont mis en place des mesures administratives, mettant un terme à la liberté de circulation des réfugiés et “une politique d’enfermement stricte envers les réfugiés nigérians. Depuis, elles déclarent que seules les personnes qui se trouvent ou arrivent dans le camp de Minawao sont considérées comme des réfugiés.” », décrit le rapport de Human Rights Watch.
« Ras-le-bol de l’amour d’Amnesty International »
Face à la multitude des attaques, les autorités camerounaises ont intensifié les contrôles à la frontière et dans le camp de Minawao, qu’elles soupçonnent d’abriter « des membres de Boko Haram ». De nombreux réfugiés ont ainsi été expulsés de force vers le Nigeria. D’après Human Rights Watch, depuis le début de cette année, plus de 4 000 personnes ont été rapatriées dans l’enfer du Nord-Est nigérian. Le HCR avait fini par dénoncer ces expulsions contraires aux accords signés par le Cameroun dans le cadre de la protection des réfugiés.
« La torture et les mauvais traitements infligés par l’armée camerounaise aux réfugiés et demandeurs d’asile nigérians semblent être motivés par une décision arbitraire visant à les punir pour les attaques menées par Boko Haram au Cameroun, et à décourager les Nigérians de demander l’asile », assure Gerry Simpson, chercheur auprès du programme Droits des réfugiés de Human Rights Watch.
Lire aussi : Comment le piège Boko Haram s’est refermé sur le lac Tchad
« Je commence vraiment à être gêné par cet acharnement. J’ai mieux à faire que de répondre à des allégations totalement hystériques qui relèvent d’un acharnement ciblé », fulmine le colonel Didier Badjeck, responsable de la communication au ministère de la défense, joint par Le Monde Afrique.
« C’est à croire que ces organisations de droits de l’homme veulent que Boko Haram s’implante au Cameroun. Savez-vous le nombre de personnes tuées chaque jour par cette secte ? Connaissez-vous le nombre d’orphelins, de veuves et de familles endeuillées à cause de ces hommes cruels et sans cœur ? Boko Haram, ce n’est pas de la blague. Il faut détruire cette secte, pas l’encourager. L’armée ne maltraite aucun réfugié qui soit réellement réfugié », ajoute une source sécuritaire en poste dans l’Extrême-Nord du Cameroun qui « en a ras-le-bol de l’amour d’Amnesty International et des autres hypocrites envers Boko Haram ».

Autres actualités

28 - Décembre - 2019

Les séparatistes pro-russes et Zelensky annoncent un échange de prisonniers dimanche en Ukraine

Un échange de prisonniers entre Kiev et les séparatistes de l’est de l’Ukraine est prévu dimanche 29 décembre, selon les rebelles prorusses et la...

24 - Décembre - 2019

Les Etats-Unis envisagent de se retirer militairement d’Afrique de l’Ouest

Les Etats-Unis envisagent de réduire considérablement leur présence militaire en Afrique de l’Ouest, voire même d’y retirer complètement leurs...

24 - Décembre - 2019

Franc CFA : le polémiste franco-béninois Kémi Séba interpellé au Burkina Faso

Le militant anticolonialiste franco-béninois Kémi Séba, fondateur du mouvement Urgences panafricanistes, a été interpellé samedi à Ouagadougou,...

21 - Décembre - 2019

Après la répression, le sentiment d’asphyxie des Iraniens

La scène rapportée à la presse iranienne par le député Mahmoud Sadeghi se déroule un jour de décembre au Parlement. Le ministre de...

21 - Décembre - 2019

En Belgique, une première condamnation pour génocide dans les enquêtes sur le Rwanda

Coupable de génocide. Coupable de crimes de guerre. Le jury de la cour d’assises de Bruxelles n’aura pas vacillé, malgré les dénégations virulentes...