« Certaines idées de Donald Trump ne seraient, en France, défendues que par le FN »
Professeur agrégé d’histoire, Corentin Sellin décrypte la « trumpisation » à l’œuvre dans les discours de Laurent Wauquiez et Marion Maréchal-Le Pen.
Expert de la politique américaine, professeur agrégé d’histoire, Corentin Sellin a notamment publié en juin 2017 une note intitulée Trump, candidat des pauvres, président des riches ? pour l’Institut français des relations internationales.
Quelles sont les caractéristiques du « trumpisme » ?
C’est d’abord un discours de rejet profond de la classe politique traditionnelle. L’idée qu’il a répétée à de nombreuses reprises est que Washington et le Congrès ne font rien à part servir leurs propres intérêts et que lui seul, milliardaire non affilié, serait en mesure de défendre l’intérêt national, au-dessus des partis et des factions.
Depuis Reagan, le conservatisme américain s’appuyait sur trois piliers : les valeurs morales, conservatrices, incarnées par la lutte contre l’avortement ; la dérégulation et la baisse des impôts ; l’augmentation des budgets militaires pour assurer une suprématie incontestée des Etats-Unis dans le monde. Trump ajoute à cet ADN conservateur traditionnel une quatrième dimension qui est doublement identitaire : le rejet de l’immigration et, en corollaire, le refus d’un libre-échange mondialisé et incontrôlé, au nom de la défense d’une identité blanche états-unienne qui serait menacée de dissolution.
Troisième caractéristique : un affranchissement complet des règles de bienséance et d’expression politique traditionnelles. Trump, qui prétend incarner avant tout l’homme blanc de la rue, parle avec des mots qu’il peut comprendre. Cela lui a permis de devenir le porte-voix de beaucoup de personnes qui, à tort ou à raison, s’imaginent oubliées.
Lesquelles de ces caractéristiques retrouvez-vous dans le discours de Laurent Wauquiez ?
Essentiellement la troisième : une volonté délibérée d’employer des mots populaires, une gouaille qui s’adresse d’abord à l’homme de la rue. Ce procédé utilisé par Sarkozy vire au système. Comme Trump, il a également la volonté...