Chiites et communistes s’allient pour les élections irakiennes
Les deux forces protestent ensemble depuis 2015 contre la corruption.
Des partisans de Moqtada Al-Sadr manifestent contre la reconnaissance par les Etats-Unis de Jérusalem comme capitale d’Israël, à Bagdad, le 8 décembre 2017.
Au sein du modeste siège du Parti communiste irakien (PCI), place Al-Andalous, dans le centre-ville de Bagdad, on se prépare à une campagne inédite pour les élections du 12 mai : les premières de l’après-Etat islamique. Le parti laïc de gauche a choisi de s’allier au mouvement du chef religieux chiite, Moqtada Al-Sadr, au sein de la coalition électorale Sa’iroun (« En marche »). Dès le 10 avril, ils feront campagne commune pour les législatives et les provinciales avec un programme réformiste.
« En marche vers les réformes ! Comme le président Emmanuel Macron », résume, avec une pointe d’humour, le secrétaire général du PCI, Raëd Fahmi, un sexagénaire parfaitement francophone. Cette alliance sans précédent du turban et de la faucille a soulevé quelques réticences en interne. Mais la proximité l’a emporté, construite au fil de trois ans de combat commun au sein du mouvement de protestation lancé à l’été 2015 contre la corruption et le confessionnalisme politique. Lorsque Moqtada Al-Sadr avait intimé à sa base de plusieurs millions de partisans disciplinés de se joindre aux manifestations, il a sauvé un mouvement alors sur le point de s’essouffler.
« Cette coordination a levé certaines perceptions négatives et craintes réciproques. Nous avons la même base sociologique, ça aide. Dans les quartiers populaires, l’alliance a été bien accueillie par les sadristes. Certains ont des parents qui étaient communistes autrefois », explique M. Fahmi. Force politique majeure du milieu du XXe siècle en Irak, le PCI a été laminé par la dictature de Saddam Hussein. C’est le courant sadriste, alliant islam puritain et action sociale sous la figure tutélaire de l’ayatollah Mohamed Al-Sadr, le père défunt de Moqtada, qui prit le relais dans les quartiers populaires chiites de Bagdad et du sud du pays à partir de la deuxième moitié des années 1990.