En Argentine, le défi du confinement dans les bidonvilles

22 - Avril - 2020

Il n’aura fallu que quelques semaines pour bouleverser le quotidien de la paroisse San Juan Bosco, située au cœur du bidonville La Carcova. En cuisine, les bénévoles s’activent, équipés de masques et de gants : ils sont passés d’une moyenne de 250 repas distribués chaque jour aux familles du quartier à près de 2000 depuis le début de l’épidémie due au coronavirus. « On doit tout repenser, tout adapter », lâche le père José Maria Di Paola, à la tête de la paroisse.

Près de 80 000 personnes vivent dans les quartiers populaires – dont fait partie La Carcova – de la municipalité de San Martin, à l’ouest de Buenos Aires. Le confinement, en vigueur depuis le 20 mars dans toute l’Argentine et jusqu’au 26 avril au moins, y est « compris et respecté dans la mesure du possible, selon le père Di Paola, qui fait partie du mouvement des « curas villeros », ces prêtres catholiques qui logent et travaillent dans les villas, les bidonvilles. Mais pour les habitants, il y a une forte tension entre la nécessité de protéger leur santé et leurs besoins économiques. »

Dans un pays marqué par une importante pauvreté structurelle, et frappé depuis deux ans par une grave crise économique, la pandémie due au coronavirus est une épreuve supplémentaire pour les quatre millions de personnes vivant dans des quartiers populaires (bidonvilles ou terrains occupés) d’Argentine. Les mesures mises en place très tôt par le gouvernement argentin ont permis de contenir, pour l’heure, l’épidémie dans le pays – au 21 avril, l’Argentine (44 millions d’habitants) comptait 3 144 cas confirmés de Covid-19, dont 151 mortels. Mais plusieurs cas ont alerté sur les risques que présenterait une contagion massive parmi les plus démunis.

« Reste dans ton quartier »

Début avril, Andrea Gomez, femme de ménage au Sénat et habitante de la villa 1-11-14, l’un des plus grands bidonvilles de Buenos Aires, est décédée du Covid-19. Mardi 21 avril, un premier cas de coronavirus a été confirmé dans la villa 31, immense bidonville qui borde l’autoroute nord de la capitale.

« Moins de 10 % des habitants de ces quartiers ont accès aux services de base, comme l’eau courante ou un système d’évacuation des eaux usées, indique Felipe Bosch, géographe, analyste du Groupe d’études géopolitiques de l’Ecole normale supérieure. Dans un contexte de crise, il est quasi impossible de suivre toutes les recommandations sanitaires. »

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