Entre Pékin et Islamabad, les Ouïgours sous surveillance
Les « nouvelles routes de la soie » (3/8). Le développement de la région du Xinjiang, dans l’ouest de la Chine, fait craindre une plus grande marginalisation des autochtones.
Contrôle d’identité à Kachgar, le 24 mars.
Grande comme l’Iran, la région autonome ouïgoure du Xinjiang, dans l’ouest de la Chine, est présentée par Pékin comme une pièce centrale de son initiative des « routes de la soie ». Kachgar, ville mythique des confins de l’Asie centrale, doit être ainsi reliée à Gwadar, le port du sud-ouest du Pakistan, par une route améliorée et de nouveaux tronçons ferroviaires. Le Xinjiang est frontalier de huit pays, et la plupart des nouveaux trains de marchandises à destination de l’Europe, par exemple, le traversent avant de passer au Kazakhstan.
« Carrefour eurasiatique » selon l’historien James Millward, le Xinjiang fut pendant des siècles le nœud d’interconnexion des routes de la soie alors aux mains de négociants locaux, persanophones, puis turcophones. Les populations autochtones se retrouvent alors régulièrement sous domination chinoise – la dynastie des Qing y implante un temps des garnisons –, mais s’avèrent le plus souvent farouchement déterminées à s’y soustraire en s’appuyant sur d’autres influences. Aujourd’hui, les 10 millions d’Ouïgours, turcophones et musulmans, forment 45 % de la population du Xinjiang (22 millions d’habitants). Les Chinois han, l’ethnie majoritaire en Chine, y sont 9 millions.
Après les années de fermeture maoïste, « les dirigeants chinois se sont mis simultanément à ouvrir la région comme un conduit vers le reste de l’Eurasie et à l’intégrer plus étroitement au reste de la Chine », écrit M. Millward. Sitôt qu’elle émerge, la nouvelle élite commerçante locale devient suspecte aux yeux de Pékin, comme le symboliseront l’ascension puis la chute de Rebiya Kadeer, à un moment donné la femme d’affaires la plus riche de Chine. Cette figure politique, cooptée par le régime, s’aventurera à défendre les droits des Ouïgours et sera vilipendée, puis emprisonnée jusqu’à son exil aux Etats-Unis, en 2005. Elle est aujourd’hui la chef de file de l’opposition démocratique ouïgoure en exil.
« Expansion de la menace »
Parallèlement,...