Etats-Unis : un procureur spécial va enquêter sur le rôle de la Russie dans l’élection de 2016

18 - Mai - 2017

Etats-Unis : un procureur spécial va enquêter sur le rôle de la Russie dans l’élection de 2016

L’ex-directeur du FBI Robert Mueller va se pencher sur les liens entre Moscou et la campagne Trump. « J’attends avec impatience que cette affaire soit classée », a réagi ce dernier.

Lundi 15 mai, le porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, se voulait encore catégorique. « Franchement, avait-il assuré lors de son briefing quotidien, il n’y a pas besoin d’un procureur spécial » pour superviser l’enquête en cours sur les interférences russes lors de la dernière campagne présidentielle américaine. « Nous l’avons déjà dit, deux commissions du Sénat y travaillent, le FBI procède à ses propres investigations et le directeur par intérim [Andrew] McCabe a clairement précisé qu’il a les ressources nécessaires et que le travail se poursuit », avait-il ajouté.
Deux jours plus tard, les certitudes de la Maison Blanche ont été balayées par la décision du ministre adjoint de la justice, Rod Rosenstein, de désigner un procureur spécial pour superviser une enquête devenue de plus en plus sensible au fil des événements et des révélations de la presse. L’attorney general(ministre de la justice) des Etats-Unis, Jeff Sessions, s’étant récusé dans cette affaire, cette nomination ne pouvait être que du ressort de son adjoint. M. Sessions avait omis de déclarer, lors d’une audition au Sénat, avoir entretenu des contacts avec l’ambassadeur de Russie à Washington, Sergueï Kislyak.
Unanimité
Dans une capitale fédérale profondément divisée depuis l’arrivée de M. Trump à la Maison Blanche, cette nomination a fait l’unanimité. Elle a été saluée à la fois par les démocrates, qui la réclamaient depuis longtemps, et par les républicains, qui estimaient au contraire qu’elle constituerait un geste de défiance contre les commissions saisies, notamment celle du renseignement du Sénat, dont le travail est, pour l’instant, apprécié.
Cette unanimité tient pour une bonne part à la personnalité choisie : l’ancien directeur du FBI Robert Mueller, 72 ans. En poste de 2001 à 2013 sous des présidents républicain puis démocrate, ce dernier peut afficher des états de service exempts de controverses. Rod Rosenstein avait travaillé sous son autorité au département de la justice, il y a deux décennies, sur des affaires de corruption.
Robert Mueller a aussi fait la preuve, à la tête du FBI, de sa capacité à résister aux pressions politiques. Cela avait été notamment le cas en 2004, lorsqu’il s’était opposé à certains aspects d’un projet de surveillance de l’Agence de sécurité nationale (NSA) américaine, considérés comme illégaux. M. Mueller avait pu s’appuyer alors sur l’adjoint de l’attorney general des Etats-Unis, James Comey, qui lui avait succédé à la tête du FBI. Ce dernier a été limogé le 9 mai par Donald Trump, ravivant les tensions autour de l’enquête russe.
La multiplication de révélations, notamment l’hypothèse avancée par le New York Times d’une tentative d’obstruction de la justice par Donald Trump, a rendu le recours à un procureur spécial inévitable. Selon le quotidien, le président aurait suggéré en février à M. Comey de ne pas enquêter sur son premier conseiller à la sécurité nationale, Michael Flynn. Ce dernier avait été contraint de démissionner pour avoir menti sur le contenu d’une conversation téléphonique avec l’ambassadeur russe à Washington.
En tant que procureur spécial, Robert Mueller, qui avait rejoint un cabinet privé depuis son départ du FBI (il va en démissionner), disposera d’une plus grande latitude d’action, en termes notamment de commissions rogatoires. Il reste cependant placé sous l’autorité du département de la justice, en l’occurrence celle de Rod Rosenstein. Il peut être limogé à tout instant par ce dernier, ou bien par le président, si celui-ci est prêt à en payer le prix politique.
M. Trump a réagi sèchement à cette nomination. Dans un communiqué, sans jamais mentionner le nom de Robert Mueller, il a assuré : « Comme je l’ai dit à plusieurs reprises, une enquête approfondie confirmera ce que nous savons déjà : il n’y a eu aucune collusion entre ma campagne et une entité étrangère. » « J’attends avec impatience que cette affaire soit classée rapidement », a-t-il ajouté.
« Payé par Poutine »
La saga russe ne cesse cependant de s’enrichir de nouveaux épisodes au rythme de la publication d’enquêtes de la presse. Mercredi, le Washington Post a ainsi exhumé l’enregistrement d’une conversation entre de hauts responsables du Parti républicain au Congrès, le 16 juin, dans laquelle Kevin McCarthy, le numéro deux du Grand Old Party à la Chambre des représentants, affirmait que Donald Trump était « payé par [Vladimir] Poutine ». Un porte-parole de M. McCarthy a assuré qu’il s’agissait d’une plaisanterie.
Le New York Times est revenu pour sa part sur le timing de la démission de Michael Flynn, le 13 février, en assurant que ce dernier avait indiqué à l’équipe de M. Trump, avant d’arriver à la Maison Blanche, qu’il faisait l’objet d’une enquête fédérale alors liée à des sommes d’argent versées par les autorités turques en échange d’un travail de lobbying. Ces sommes n’avaient pas été déclarées à l’administration américaine comme M. Flynn, ancien directeur du renseignement militaire, était tenu de le faire.
Selon le quotidien, l’avertissement de cet ancien général, qui avait rejoint M. Trump au début de sa campagne, n’avait pas dissuadé le président élu de le nommer au poste stratégique de conseiller à la sécurité nationale. Après avoir appris par le département de la justice, fin janvier, que M. Flynn avait menti sur sa conversation avec l’ambassadeur russe, M. Trump a attendu plus de deux semaines avant de le remercier.

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