Face à Trump, Macron défend l’accord avec l’Iran

19 - Septembre - 2017

Le sort du texte sur le nucléaire iranien est au cœur des rencontres en marge de l’Assemblée générale de l’ONU.

Les surenchères et l’hostilité déclarée de Washington menacent l’accord sur le nucléaire iranien conclu le 14 juillet 2015 par les « 5 + 1 » (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité plus l’Allemagne) avec Téhéran. Son destin est au cœur de nombre de rencontres bilatérales dans les palaces new-yorkais où les chefs d’Etat ou de gouvernement discutent des sujets les plus sensibles en marge de l’Assemblée générale des Nations unies.
Installé au New York Palace Hotel, Donald Trump a reçu, lundi 18 septembre, en début d’après-midi, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, qui le presse de dénoncer, ou pour le moins de réviser, un « épouvantable accord ». Peu après, c’était au tour d’Emmanuel Macron de rencontrer le président américain. Le chef de l’Etat français a au contraire réaffirmé son attachement à un texte respecté jusqu’ici par les Iraniens et que Paris estime plus que jamais crucial pour éviter de voir s’installer « une Corée du Nord au Moyen-Orient ».

Encore ravi de son séjour parisien du 14-Juillet, Donald Trump, lors de cette troisième rencontre, a chanté les louanges de son homologue français, « qui fait un travail fantastique en France », et évoqué son désir d’organiser un défilé militaire sur Pennsylvania Avenue, à Washington, pour la fête nationale américaine, le 4 juillet, en s’inspirant du modèle français. Plus sobre, M. Macron a rappelé que « la force de cette relation est de se dire tout, ce qui ne veut pas dire être d’accord sur tout ».
« Boîte de Pandore »
La discussion a été pour le moins « directe » – ce qui veut dire, en langage diplomatique, plutôt animée –, notamment à propos de l’accord de Paris sur le climat dénoncé par Washington et plus encore sur le nucléaire iranien. Le texte met en place, pour dix ans, sous contrôle, le programme atomique de Téhéran et garantit son caractère civil en échange d’une levée progressive des sanctions.
Dans leur rencontre de plus d’une heure, le président français a expliqué à son homologue américain que « la remise en cause et la fragilisation de l’accord de Vienne ouvriraient une boîte de Pandore ». Une loi votée par le Congrès oblige en effet Donald Trump à « certifier » tous les quatre-vingt-dix jours que Téhéran se conforme bien à ses engagements. La prochaine échéance doit intervenir à la mi-octobre. Certaines des déclarations du président laissent penser qu’il pourrait décider de ne pas le faire, alors même que les rapports de l’Agence internationale de l’énergie atomique assurent que les Iraniens jouent le jeu.
D’où l’inquiétude de Paris comme des autres signataires. « Il est essentiel de maintenir l’accord pour éviter une spirale de prolifération et encourager ainsi les parties les plus dures en Iran à se lancer dans l’acquisition de l’arme atomique. Il importe vraiment de garder cette ligne », avait déjà souligné dans la matinée le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Donald Trump a écouté Emmanuel Macron sans se rendre à ses arguments, pesant ensuite le pour et le contre d’un texte qu’il continue de considérer comme « profondément imparfait » et « mal négocié » par son prédécesseur, le démocrate Barack Obama. « Il n’a manifestement pas encore pris sa décision », souligne une source française.
« Vous verrez bientôt », a répondu M. Trump à un journaliste qui l’interrogeait sur sa décision au début de sa rencontre avec le premier ministre israélien. Au cours d’un briefing dans un autre hôtel de Manhattan, le directeur politique du département d’Etat américain, Brian Hook, a replacé la question du nucléaire dans un ensemble plus large de « menaces iraniennes » en ajoutant les essais balistiques conduits par le régime et ses activités « nuisibles » dans la région. « Il faut éviter une libanisation de la Syrie », a ainsi déclaré le diplomate dans une allusion au pays du Cèdre, où Téhéran dispose du puissant levier que constitue la milice du Hezbollah.
« Ligne rouge » iranienne
Au même moment, le président français évoquait ce sujet avec son homologue iranien, Hassan Rohani, dans un salon de l’hôtel Millennium. Les deux hommes s’étaient plusieurs fois entretenus au téléphone, mais ils ne s’étaient jamais rencontrés. Leur discussion de trois quarts d’heure n’en a pas moins été également très directe. Paris avait été la capitale la plus exigeante durant la négociation de l’accord, la France veut l’être pour sa mise en œuvre.

Mais le président français a aussi rappelé à son interlocuteur la nécessité, même si l’accord sur le nucléaire est respecté, « de rassurer et d’apaiser » les pays de la région ainsi que les Etats-Unis. « Il est possible d’être clair sur ces sujets tout en gardant ouverts des canaux de dialogue », relève un diplomate, soulignant que le président n’a pas non plus hésité à mettre sur la table la question hautement sensible pour Téhéran de « l’après-2025 », c’est-à-dire d’un renouvellement de l’accord de Vienne une fois celui-ci devenu caduque. Le sujet avait déjà été évoqué entre M. Macron et M. Trump, mais comme en a convenu le diplomate, il s’agit pour l’instant d’une « ligne rouge » iranienne.

L’Iran ne divise pas seulement Paris et Washington sur la question de son dossier nucléaire. En dénonçant une « libanisation » de la Syrie, où des forces iraniennes ont été déployées pour appuyer le régime de Bachar Al-Assad, Washington s’oppose de facto à l’idée française d’un groupe de contact pour aider à la stabilisation d’un pays ravagé par la guerre civile, groupe au sein duquel Téhéran serait représenté. Interrogé à ce sujet au terme d’une réunion ministérielle consacrée à la Syrie, en fin d’après-midi, un responsable du Moyen-Orient au département d’Etat, David Satterfield, a assuré que la question n’y avait pas même été abordée.

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