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« Il faut développer des indicateurs complémentaires qui appréhendent le bien-être et la qualité de la vie des citoyens »

05 - Novembre - 2016

« Il faut développer des indicateurs complémentaires qui appréhendent le bien-être et la qualité de la vie des citoyens »

Si le cadre conceptuel et comptable du PIB n’apparaît pas déficient, le numérique et l’internationalisation des activités économiques posent des problèmes de mesure auxquels il est important de répondre si l’on veut suivre les évolutions et comprendre les économies d’aujourd’hui, explique l’économiste Martine Durand.
L’été dernier, l’Institut national de la statistique irlandais a publié les chiffres de croissance annuelle du produit intérieur brut (PIB) pour 2015, montrant que l’économie irlandaise avait progressé à un rythme de 26,3 % par rapport à 2014, de loin la plus forte croissance de tous les pays de l’OCDE.

Ces chiffres ont suscité beaucoup de commentaires questionnant leur représentativité de l’activité économique véritable du pays. Cette croissance spectaculaire s’explique en partie par le transfert en Irlande de propriété intellectuelle – recherche & développement (R&D), brevets, design, marketing – par les grandes entreprises multinationales, essentiellement pour des raisons d’attractivité fiscale.

Des activités pas vraiment nouvelles

Dans le même temps, des doutes se sont aussi exprimés dans d’autres pays sur la capacité du PIB à rendre compte de la numérisation croissante de l’économie, telle qu’elle se manifeste à travers les nouvelles plateformes qui facilitent les transactions entre particuliers comme Airbnb, Uber ou eBay, l’émergence d’une catégorie croissante de travailleurs indépendants occasionnels, les services gratuits financés par la publicité (comme les comparateurs de prix sur Internet) et l’acquisition de données massives (big data), ou encore le fait que les ménages accomplissent désormais eux-mêmes certaines tâches (comme les réservations en ligne) précédemment réalisées par le secteur marchand.

Ces évolutions remettent-elles fondamentalement en cause les concepts et méthodes statistiques actuels et plus précisément le cadre de la comptabilité nationale ? En particulier, que peut-on dire de la validité du PIB pour mesurer l’activité nationale lorsque l’économie est de plus en plus mondialisée et de plus en plus numérique ? Lorsque le capital utilisé pour la production est de plus en plus intangible (R&D, logiciels, informatique en nuage) et peut donc être déplacé au gré de l’optimisation fiscale ? Lorsque apparaissent de nouvelles formes d’intermédiation et de provision de services ? Lorsqu’Internet brouille les frontières entre ce qui relève de l’activité marchande, de la production participative et de la simple consommation ?

Pourtant, aussi nouveau que puisse être le phénomène de numérisation de l’économie, beaucoup de ces activités ne sont pas vraiment nouvelles, du moins conceptuellement.
Ampleur du phénomène

Les services de taxis fournis via Uber demeurent dans une large mesure identiques à ceux fournis par des canaux plus classiques, par téléphone ou en attendant à une station, et ont toujours été mesurés. Plus généralement, il n’y a pas de raison de douter que les services fournis par les intermédiaires numériques soient bien mesurés par les enquêtes traditionnelles auprès des entreprises si ces intermédiaires sont enregistrés dans le pays où ils exercent effectivement leur activité.

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