« Il faut repenser la philanthropie pour l’Afrique comme une réparation de son pillage »

10 - Novembre - 2017

L’écrivain nigérian Uzodinma Iweala a prononcé le discours inaugural de la conférence sur la philanthropie organisée à Genève par « Le Monde Afrique », « Le Temps » et l’Institut de hautes études internationales et du développement

Vous avez sans doute entendu parler de ce concert mémorable du chanteur de rock Bono, symbole de la philanthropie contemporaine. Une foule fervente dansait et chantait à tue-tête tandis que les effets lumineux et pyrotechniques allaient bon train et que la musique battait son plein. Bono s’est alors arrêté et a demandé le silence. Semblant descendre du ciel, la lumière d’un projecteur s’est braquée sur lui, au centre de la scène. Il s’est mis à claquer lentement des doigts. Le public était déconcerté. Après quelques claquements, il a enfin parlé : « Chaque fois que je claque des doigts, un enfant meurt en Afrique. » Alors, dans l’obscurité de la salle, un homme avec un fort accent britannique a crié : « Ben arrête de claquer des doigts ! »
Comprenez-moi bien, j’ai du respect pour Bono. Le travail que lui et d’autres célébrités ont fait pour attirer l’attention sur des causes telles que l’allégement de la dette et la lutte contre le sida a vraiment sauvé des vies. Mais je raconte cette anecdote car je pense qu’elle résume l’un des aspects les plus intéressants – et problématiques – de la philanthropie moderne : telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, la philanthropie préserve les pouvoirs en place, lesquels sont à l’origine d’une grande partie des souffrances qu’elle tente de soulager. Et, ce faisant, elle va à l’encontre de ses intentions initiales. Cela est particulièrement vrai pour la philanthropie occidentale en Afrique.
Un acte profondément révolutionnaire
Si l’on ramène cet épisode musical aux structures et aux dynamiques du pouvoir, on voit un homme blanc sur son perchoir, tel un dieu adulé par ses adeptes, devant une assistance majoritairement blanche, s’exprimant au sujet d’Africains si misérables que lui et son public, avec leurs bonnes intentions, se croient dotés d’un pouvoir absolu sur des vies noires. Si cela vous fait penser au colonialisme, ce n’est pas un hasard. Il est impossible de discuter de la philanthropie...

Autres actualités

01 - Avril - 2020

Mali : la France a une « preuve de vie » de l’otage Sophie Pétronin, selon ses proches

La France dispose d’une preuve de vie « fiable » et récente de Sophie Pétronin, l’humanitaire française enlevée au Mali et retenue en otage...

01 - Avril - 2020

« Il faut éviter que cette crise de santé publique ne déclenche une crise alimentaire »

La pandémie du Covid-19 met à rude épreuve les systèmes de santé publique du monde entier, et des millions de personnes dans les pays du monde les plus...

31 - Mars - 2020

En Libye, libération de deux ingénieurs pétroliers, dont un Roumain, enlevés en 2018

La Compagnie nationale libyenne de pétrole (NOC) a annoncé lundi 30 mars la libération de deux de ses employés, dont un Roumain, enlevés en juillet 2018 sur un...

31 - Mars - 2020

Médicaments : neuf grands hôpitaux européens lancent un appel à l’aide

L’alerte vient des neuf plus grands hôpitaux d’Europe. Dans une lettre adressée à leurs gouvernements respectifs, les médecins appellent à des...

30 - Mars - 2020

En Afrique, le Covid-19 nourrit une vague d’exode urbain

De mémoire de gendarme, rarement la route nationale 7 avait accueilli pareil exode. Depuis plusieurs jours, des centaines de Malgaches laissent derrière eux la capitale,...