L’implacable emprise de Pékin sur Hongkong

19 - Août - 2017

La condamnation, le 17 août, de trois opposants au régime chinois illustre à nouveau la volonté de Xi Jinping de ne laisser aucune chance aux Hongkongais de montrer l’exemple démocratique.

Hongkong, place financière majeure et longtemps îlot de liberté face à la Chine continentale, est pris à la gorge. Les autorités locales viennent d’en apporter une implacable démonstration en condamnant, jeudi 17 août, à des peines de prison ferme trois des principales figures d’une nouvelle génération d’opposants à l’emprise du régime chinois. Leur crime ? Avoir organisé et incarné le « mouvement des parapluies », cette révolte déclenchée par une protestation publique illégale en septembre 2014 et prolongée pendant 79 jours par l’occupation du centre de l’ancienne colonie britannique.
En première instance, les juges avaient opté pour la clémence et condamné les jeunes gens à des travaux d’intérêt général et à une peine de trois semaines avec sursis. Mais l’administration locale, qui n’est plus vue que comme une marionnette derrière laquelle se dissimule à peine la main du Parti communiste chinois, n’a pas voulu s’en tenir là. Elle a obtenu, en appel, six mois de prison ferme pour l’icône Joshua Wong, 20 ans, ou encore huit mois pour Nathan Law, le plus jeune député de la région administrative spéciale dont le mandat a été suspendu pour avoir préféré un discours critique au texte officiel lors de sa prestation de serment.
Lire aussi : A Hongkong, les leaders du « mouvement des parapluies » condamnés à de la prison
Le choix du pouvoir chinois est sans ambiguïté. Il s’agit d’étouffer le sentiment de plus en plus critique à son égard de la population locale. Le temps est bien loin où Pékin, au lendemain de la rétrocession de 1997 par le Royaume-Uni, voulait charmer Hongkong, pour convaincre également Taïwan d’envisager son retour dans le giron chinois.
On reconnaît, là, le pouvoir décomplexé et dominateur du président Xi Jinping. En Chine continentale, il n’hésite pas à réprimer avocats, journalistes, activistes et autres éléments d’une société civile n’exigeant pourtant que l’application de la Constitution. A Hongkong, non content de laver l’affront de la révolte de l’automne 2014, il entend ne laisser aucune chance aux Hongkongais – qui disposent de droits exorbitants par rapport à ceux de leurs compatriotes du continent – de montrer l’exemple démocratique.
Cette décision de justice est très préoccupante. Elle intervient après la tentative d’imposer des cours d’éducation patriotique ou après l’enlèvement d’éditeurs de livres critiques du régime qui ont été transférés vers le continent et forcés d’avouer leurs fautes. Elle s’ajoute au projet de permettre à la police chinoise d’opérer dans la gare de Hongkong, ou à la reprise en main de la presse locale, longtemps restée l’une des plus pertinentes d’Asie, par des entreprises chinoises loyales au régime. Le 11 août, c’est la radiotélévision publique de Hongkong qui abandonnait le service de la BBC sur ses ondes pour lui préférer la radio officielle chinoise afin « d’augmenter les échanges culturels entre le continent et Hongkong ».
Lire aussi : Pékin lance une enquête contre les réseaux sociaux chinois pour « contenus illicites »
« Un pays, deux systèmes », promettait Pékin lors de la rétrocession. La liste des indices d’une érosion accélérée de la singularité de Hongkong par rapport au reste de la Chine ne cesse de s’allonger. Le calcul des autorités chinoises n’est pas absurde. Les « tycoons » qui tiennent l’économie de cette ville de 7 millions d’habitants leur sont déjà largement acquis puisqu’ils surfent sur la croissance de l’économie continentale. Pour parachever le rapprochement, il suffirait de museler les jeunes réfractaires. C’est ignorer qu’en les emprisonnant, c’est toute une génération de Hongkongais que la Chine risque de dresser encore un peu plus contre elle.

Autres actualités

04 - Avril - 2020

En Cisjordanie, le coronavirus exacerbe la défiance envers les autorités

Sur les réseaux sociaux ou via les messageries instantanées, les rumeurs se sont propagées plus vite que le virus lui-même en Cisjordanie. Il y a eu les traditionnelles...

03 - Avril - 2020

Au Japon, Shinzo Abe rattrapé par une vieille affaire de corruption

Trois ans après, l’affaire de favoritisme au profit de l’institution éducative Moritomo Gakuen revient hanter le premier ministre japonais, Shinzo Abe, et son ministre...

03 - Avril - 2020

Inquiétude mondiale sur les inévitables pénuries de médicaments

Pénurie de masques. Pénurie de blouses. De bouteilles d’oxygène, de seringues automatiques, de sacs mortuaires. Pénurie de tout. Et maintenant de...

02 - Avril - 2020

« Les casques bleus ne sont pas le remède, mais ils tiennent une place dans la lutte contre le Covid-19 »

Personne, aucune communauté, aucun pays, n’est à l’abri de cette pandémie mortelle. Il s’agit d’une crise de dimension mondiale, dont les...

02 - Avril - 2020

Face au coronavirus, la menace de la rougeole se fait plus pressante en Afrique

Alors que le monde entier a les yeux rivés sur la propagation du Covid-19, l’Alliance du vaccin Gavi craint que les mesures de confinement, qui limitent les vaccinations de routine,...