« La Chine aimerait séduire. La vérité est qu’elle fait peur, à tort ou à raison »
Omniprésente, la Chine est chez nous, en Europe. Elle est là pour rester, avec nous – et contre nous aussi. Si elle va mal, nous allons mal : une Chine fâchée avec la croissance ne fait pas nos affaires. Mais une Chine conquérante, sûre d’elle-même et de sa force, « c’est une menace à bas bruit », dit l’un de ses familiers.
La Chine aimerait séduire. La vérité est qu’elle fait peur, à tort ou à raison. Et ce sentiment-là, la peur, est en passe de dominer les relations entre la Chine et une partie de ses partenaires étrangers, en Europe et ailleurs. Pékin ne peut pas l’ignorer.
Nous entrons dans un monde où la masse chinoise entend faire sentir sa prépondérance. C’est presque une impression physique. A côté, nos petites affaires de continent querelleur, à nous Européens, paraîtront un jour, au regard de l’histoire qui s’annonce, comme plaisanteries de garçons de bain.
Un géant militaire en formation
Nécessité pédagogique, il faut ressasser quelques-unes des vérités factuelles qui vont façonner la mondialisation de demain – une globalisation aux caractéristiques chinoises affirmées. Dans son Trump et Xi Jinping, les apprentis sorciers (L’Observatoire, 2018), aussi didactique que pessimiste, l’économiste Christian Saint-Etienne rappelle une donnée de base : d’ici à 2050, demain en somme, la Chine représentera 20 % de la richesse mondiale, l’Inde 15 %, les Etats-Unis 12% et l’Union européenne (UE) 9 %.
La deuxième économie du monde va vite devenir aussi la première ou, derrière les Etats-Unis, la seconde puissance technologique de la planète. Géant militaire en formation, sa marine devrait dépasser celle des Etats-Unis en 2030 (500 unités contre 350).
Puissance financière, elle se livre à une « débauche d’investissements » à l’étranger, pour reprendre l’expression de François Godement de l’Institut Montaigne – qui, avec Abigaël Vasselier, signe La Chine à nos portes, une stratégie pour l’Europe (Odile Jacob, 2018). Enfin, la Chine affiche sa volonté d’expansion géo-politique et le désir d’imprimer sa marque sur la mondialisation avec son projet des « nouvelles routes de la soie ».
Dépit américain
Les Etats-Unis, qui n’ont pas peu contribué au renouveau économique de la Chine, la qualifient aujourd’hui de « concurrent stratégique ». Ils l’accusent de comportement déloyal, d’être une fausse économie de marché, bref de mener une politique de prédation aux fins de prendre le relais de l’Amérique dans l’exercice du « leadership mondial ».