">

La procureure de la CPI maintient sa demande d’enquête en Afghanistan

08 - Juin - 2019

La procureure de la Cour pénale internationale (CPI) ne désarme pas face aux pressions américaines. Dans une requête déposée vendredi soir, Fatou Bensouda demande le droit de faire appel d’une décision rendue mi-avril l’empêchant d’enquêter sur l’Afghanistan. La procureure souhaite conduire des investigations sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis par les talibans, les organes sécuritaires du régime et les forces américaines, en Afghanistan depuis 2002. Sa demande s’étendait aux tortures perpétrées dans les prisons secrètes de l’Agence centrale de renseignement (CIA) américaine en Pologne, en Roumanie et en Lituanie. Mais pour les trois juges en charge de l’affaire, une telle enquête n’est pas « dans l’intérêt de la justice ».

Selon eux, l’absence de coopération, au premier chef des Etats-Unis, rendrait impossible la tenue d’un procès. Les juges avaient mis dix-sept mois pour rendre leur décision, pendant lesquels l’administration Trump proférait publiquement ses menaces contre la Cour. En septembre 2018, le conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, menaçait les juges et assénait : « Pour nous, la CPI est morte ».

Le secrétaire d’Etat Mike Pompeo annonçait, fin mars, avoir révoqué le visa de la procureure et initié d’autres sanctions. Et dès l’annonce de la décision, Donald Trump saluait sa victoire sur Twitter et mettait en garde la Cour contre des poursuites futures contre ses alliés, au premier chef Israël, alors que la procureure procède actuellement à un examen préliminaire sur la colonisation des territoires occupés et la guerre de 2014 à Gaza.
Décision « honteuse » et « dangereuse »

En donnant raison à trois défenseurs de la torture, la Cour sapait ses propres fondements. L’approche des juges « exclut toute possibilité que l’une des affaires potentielles fasse l’objet d’une enquête par la Cour dans un avenir proche », écrit la procureure dans sa demande d’appel. Les conséquences de la décision des juges dépassent le seul enjeu de l’affaire sur l’Afghanistan. Cela « va bien au-delà de la crédibilité de la Cour », estime Fatou Bensouda, et touche « sa fonction même et sa légitimité ». Aucun Etat, même les plus vertueux, n’a jamais coopéré pleinement avec la justice internationale, et la magistrate gambienne rappelle aux juges que « ces défis font partie de sa responsabilité statutaire ». La bonne santé de la justice internationale se mesure à la capacité des juges et des procureurs à manier les enjeux politiques pour parvenir à rendre justice. Dans le cas des crimes commis par l’armée américaine en Afghanistan, rien ne dit que des acteurs politiques ne trouveraient pas intérêt à coopérer avec l’enquête, et de l’avis de procureurs aguerris, l’affaire visant l’armée américaine et la CIA est juridiquement parmi les moins complexes.

Autres actualités

24 - Octobre - 2018

En Algérie, le président « légal » de l’Assemblée refuse de céder le perchoir

Les députés de la majorité, en conflit ouvert avec Saïd Bouhadja, ont élu Mouad Bouchareb pour le remplacer. En Algérie, l’Assemblée...

23 - Octobre - 2018

Torture et persécution : la face sombre de l’Autorité palestinienne et du Hamas

« Nous allons te dévorer. » C’est la phrase qu’entendit le journaliste Sami As-Sai, en février 2017, peu après son transfert dans les locaux des...

23 - Octobre - 2018

En Iran, les pauvres, premières victimes des sanctions américaines

Il y a deux mois que Fatemeh n’a pas acheté de viande pour ses deux fils. Cet été, pendant un mois, cette femme de ménage de 42 ans du quartier...

22 - Octobre - 2018

Mort de Jamal Khashoggi : l’Allemagne suspend ses ventes d’armes à l’Arabie saoudite

Condamnant « avec la plus grande fermeté » la mort du journaliste saoudien en Turquie, Angela Merkel a décidé de ne plus autoriser de contrats d’armement...

22 - Octobre - 2018

Décryptage Présidentielle au Cameroun : et à la fin, c’est encore Biya qui gagne

Le président sortant, 85 ans dont près de trente-six au pouvoir, a été reconduit pour un mandat de sept ans avec 71,28 % des suffrages. L’élection...