Maroc : des dizaines de blessés lors de rassemblements dispersés par la police à Al-Hoceima

21 - Juillet - 2017

Prévue de longue date, la manifestation visait à réclamer la libération des partisans arrêtés depuis le début du mouvement pacifique qui agite la région du Rif.
Altercation avec la police lors d’une manifestation interdite à Al-Hoceïma au Maroc, le 20 juillet.
Les forces de l’ordre marocaines ont dispersé, jeudi 20 juillet, des rassemblements dans la ville d’Al-Hoceima, épicentre d’un mouvement de contestation pacifique qui agite le nord du Maroc, empêchant la tenue d’une manifestation prévue de longue date.
Des affrontements ont opposé la police aux manifestants et ont fait des dizaines de blessés des deux côtés, selon une source officielle.
« Soixante-douze éléments des forces publiques ont été blessés (…) suite à des jets de pierres (…), onze personnes parmi les manifestants suite à l’usage du gaz lacrymogène », a informé jeudi soir la préfecture d’Al-Hoceima, citée par l’agence de presse officielle MAP.
Une ville quadrillée par la police
La police a utilisé des bombes lacrymogènes et usé de la force pour empêcher la grande marche qui avait été prévue de se tenir malgré l’interdiction émise par les autorités lundi.
« Tous les blessés ont quitté l’hôpital où ils ont été transférés, à l’exception de deux éléments des forces publiques dont l’état de santé est jugé grave », a ajouté la préfecture. Cette dernière a aussi fait état de « deux véhicules des forces publiques endommagés et incendiés par certains manifestants à Ajdir », une localité voisine d’Al-Hoceima.
Lire aussi : Maroc : « La longévité du Hirak s’explique par l’absence de démocratie locale »
Les partisans du Hirak, nom donné au mouvement du Rif, région historiquement frondeuse, avaient commencé à se regrouper en fin d’après-midi dans plusieurs points de la ville, mais les forces de l’ordre sont immédiatement intervenues pour charger les manifestants et empêcher le début de la marche donnant lieu à des face-à-face tendus avec des jets de pierre entre les deux parties.
En début d’après-midi, la police avait commencé à quadriller les principales places de la ville, y interdisant tout accès, alors que la quasi-totalité des commerces étaient fermés.
Protester « contre la répression »
Interdite par les autorités, la grande marche prévue de longue date pour réclamer la libération de nombreux partisans arrêtés avait été maintenue. Elle visait aussi à dénoncer la marginalisation de la région. Cette « marche pacifique » devait enfin, selon ses organisateurs, permettre de protester « contre la répression » et « maintenir le combat populaire contre le makhzen [pouvoir] ».
« Vive le Rif, vive Zefzafi ! », ont crié des centaines de manifestants, jeudi, en référence au leader du mouvement, Nasser Zefzafi, arrêté fin mai. Ils sont parvenus à défiler brièvement dans le quartier de Sidi Abed, avant d’être dispersés.
Lire aussi : Au Maroc, le leader de la contestation dans le Rif a été arrêté par la police
« Nous sommes dans un pays où il n’y a pas de liberté d’expression. On réclame des hôpitaux, du travail, du transport. Où est le mal ? », s’est indigné un sympathisant du mouvement, la trentaine, un drapeau amazigh (berbère) sur les épaules.
Le président pour la ville d’Al-Hoceima de l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH), Mustapha Allach, a de son côté déploré d’« importantes entraves aux libertés », faisant état de « nombreuses arrestations de manifestants. » Des journalistes sur place ont déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) avoir été témoins d’une dizaine d’interpellations, dont celle de Hamid Al-Mahdaoui, le patron d’un site d’information local.
Une région marginalisée
De leur côté, les six partis de la majorité avaient appelé, dans un communiqué conjoint, à ne pas prendre part à la manifestation, afin de « restituer un climat de confiance et d’apaisement ».
Depuis la mort, fin octobre 2016, du vendeur de poisson Mouhcine Fikri, broyé accidentellement dans une benne à ordures, la province d’Al-Hoceima a été le théâtre de nombreuses manifestations pacifiques pour exiger le développement d’une région que ses habitants jugent marginalisée.
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La relance par l’Etat d’un vaste plan d’investissements et de chantiers d’infrastructures n’a pas suffi à désamorcer la colère.
Le mois de mai a été marqué par un durcissement des autorités, avec l’arrestation des figures du mouvement. Selon un dernier bilan officiel, 176 personnes ont été placées en détention préventive ; 120 sont actuellement jugées, et des peines de prison ont déjà été prononcées en première instance.
Sous la pression, les manifestations avaient cessé, début juillet, et la tension était retombée d’un cran avec le retrait des policiers de lieux publics emblématiques de la ville.

 

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