Pierre Vermeren : « Au Maroc, le Palais royal a gardé le contrôle sur tous les ministères de souveraineté »
Pierre Vermeren : « Au Maroc, le Palais royal a gardé le contrôle sur tous les ministères de souveraineté »
Historien du Maghreb contemporain, professeur à l’université de Paris-I Panthéon-Sorbonne, Pierre Vermeren est l’auteur de l’Histoire du Maroc depuis l’indépendance (La Découverte, 2010, réédition juillet 2016). Il y décrypte les évolutions politiques du Maroc depuis l’arrivée au pouvoir de Mohammed VI en 1999, et tente de répondre à la question : d’Hassan II à Mohammed VI, le Maroc s’est-il démocratisé ?
Le nord du Maroc, longtemps marginalisé, a connu ces dix dernières années un essor formidable. Est-ce la preuve d’une transformation du pays au cours du règne de Mohammed VI ?
Non, car le Nord n’est pas représentatif du Maroc. Cette région, interface avec l’Europe, avait été punie par Hassan II en raison des soulèvements qui y avaient éclaté au lendemain de l’indépendance [en 1956]. Elle avait été laissée à l’abandon par l’Etat. La population vivait grâce à l’argent de la diaspora, mais aussi au trafic de drogue et à la contrebande avec l’Espagne. Mohammed VI a développé le Rif à la mesure de ce qu’avait été son sous-développement. Il n’avait plus le choix : la situation y était devenue intenable. La mafia y était très puissante et pouvait devenir un facteur de déstabilisation. En outre, le roi a toujours eu des liens affectifs avec cette région.
Le fils d’Hassan II a vite été qualifié de monarque moderne et ouvert. Mohammed VI savait-il dès le départ quel roi il souhaitait être ?
C’est difficile à dire : il y a bien quelques discours officiels – dont on a tiré des slogans comme « Nouvelle...