Pour le président du Comité européen des régions, « il faut oser débattre de la Catalogne »

09 - Octobre - 2017

Pour Karl-Heinz Lambertz, la volonté de créer un nouvel Etat n’est pas illégitime si le droit et les règles juridiques sont respectés.
Karl-Heinz Lambertz, à Bruxelles, le 9 octobre.
Président, depuis juillet, du Comité européen des régions, une assemblée de 350 représentants des pouvoirs locaux, le Belge germanophone Karl-Heinz Lambertz prône à son tour un dialogue entre Madrid et Barcelone. Sans vouloir avancer le nom d’un éventuel « médiateur ».
Considérez-vous, comme une majorité de dirigeants européens, que ce qui se déroule en Catalogne est un problème purement interne à l’Espagne ?
Non, mais je dois constater, moi aussi, que l’Union n’a pas de compétence pour se mêler de cette question. Il faut cependant qu’elle soit à la hauteur de ses ambitions et de ce que, personnellement, je souhaiterais qu’elle soit… Car elle est davantage qu’une organisation interétatique classique, et quand l’un de ses organes va mal, c’est tout son corps qui est rapidement affecté. Il faut donc oser débattre de la question catalane, et c’est ce que je dois proposer, mardi 10 octobre, aux membres de mon comité.
Je ne pense pas qu’une telle discussion puisse être limitée à un débat entre Espagnols. Elle concerne la qualité de la décentralisation et de la politique régionale en Europe et on sent bien qu’aux yeux de certains, ce qui se déroule en Catalogne a l’allure d’un précédent.
Vous craignez, vous aussi, que cela crée un précédent ?
Non. Parce que la grande majorité des régions qui réfléchissent sur leur statut ne le font pas en visant l’indépendance. Il faut toutefois admettre que cela existe en certains endroits et on ne peut pas dire que la volonté de créer un nouvel Etat soit, en soi, illégitime. J’insiste : en soi, en vertu des règles du droit international public.

En tout cas, quelques principes fondamentaux doivent toujours être rappelés. Le nécessaire respect du droit, d’abord : on ne peut faire sécession sans un accord ou des règles juridiques l’autorisant. Deuxièmement, c’est la discussion au sein de l’Etat concerné qui doit prévaloir, et l’Espagne a d’ailleurs fourni jusqu’ici un bon exemple de cela, avec une approche asymétrique et des solutions taillées sur mesure pour ses différentes régions. C’est une absence de dialogue durant plusieurs années entre Madrid et Barcelone qui a conduit au blocage et à l’escalade actuels. Troisièmement, la proportionnalité. L’usage de la force policière pour régler ce type de conflit est néfaste et disproportionné.
Il faut donc dialoguer, organiser une médiation. Mais qui doit la mettre en œuvre ?
L’une des conditions essentielles n’est actuellement pas réunie : la volonté des deux parties de participer à une médiation et de conclure un compromis acceptable par tous. Il est donc inutile, à ce stade, de faire une proposition ou de citer des noms. Je sais seulement que l’Union doit absolument favoriser une solution intraétatique. La Belgique peut, à cet égard, fournir un bon exemple, elle qui, partant de positions très antagonistes, arrive à des accords acceptés par tous, quitte à ce qu’ils soient parfois incompréhensibles…
Certains affirment qu’en soutenant le développement régional, l’Union européenne voulait en fait affaiblir les Etats-nations et, ainsi, mieux asseoir son propre pouvoir. Que pensez-vous de cette analyse ?
Vaste et complexe sujet… Pendant un temps, certains ont eu l’illusion que l’Europe des régions pouvait remplacer l’Europe des Etats. Ce n’est pas mon avis, car cette idée conduit à un cul-de-sac. Les institutions et la Commission européenne, par les politiques régionales ou de cohésion, ont évidemment créé un lien direct et indispensable avec les pouvoirs infranationaux. Mais, pour moi, l’existence même de l’UE devrait réduire les volontés de création de nouveaux Etats. Parce que son modèle de gouvernance doit, idéalement, favoriser les solutions internes.
J’ajoute que si on veut vraiment relancer l’Europe, il faut le faire à partir de la base, des endroits où des gens la vivent économiquement, humainement, émotionnellement

Autres actualités

15 - Septembre - 2018

Affaibli et isolé, Mahmoud Abbas bloque tout accord sur Gaza qui le contournerait

L’espoir est épuisant quand il ne cesse d’être déçu. A tous leurs maux, les Gazaouis doivent ajouter cette souffrance : croire en vain que...

15 - Septembre - 2018

En Irak, le Parlement élit son nouveau président et amorce une sortie de crise

Le Parlement irakien a élu à sa présidence, samedi 15 septembre, le candidat soutenu par la liste pro-Iran. Alors que le pays est paralysé depuis les élections...

14 - Septembre - 2018

Au nord de Londres, les militants du Labour effarés et meurtris par les accusations d’antisémitisme

uisa Attfield n’a pas 20 ans mais vit déjà un douloureux dilemme. Perchée sur un tabouret haut du pub The Bohemia, au cœur de North Finchley (nord-ouest de...

14 - Septembre - 2018

Signe d’un nouveau rapprochement, les deux Corées ouvrent une « ambassade » commune

Alors que les échanges entre les Etats-Unis et la Corée du Nord semblent dans l’impasse depuis le sommet entre Donald Trump et Kim Jong-un le 12 juin à Singapour, les...

13 - Septembre - 2018

Le premier ministre hongrois Viktor Orban lâché par ses alliés européens

Mieux vaut tard que jamais. En votant, mercredi 12 septembre, par 448 voix contre 197, en faveur du déclenchement d’une procédure contre la Hongrie pour atteintes à...