Turquie : « Dérive autoritaire et dérive de l’économie, une seule et même trajectoire ? »

20 - Juin - 2018

Depuis quatre ans, les réformes ont été mises sous l’éteignoir. Seul compte le primat à la croissance stimulée à coup de crédit facile et d’impulsion fiscale. Au risque de la surchauffe et d’un ralentissement, constate dans sa chronique la journaliste du « Monde », Marie de Vergès.

« A l’approche d’un scrutin crucial – législatives et présidentielle – le 24 juin, le « Reis » (« le chef », l’un de ses surnoms) s’est sans doute laissé convaincre de l’urgence d’agir face au risque de crise monétaire »

Vu d’ailleurs. C’est devenu l’une des suppliques favorites du président turc, Recep Tayyip Erdogan. « Mes frères, que ceux d’entre vous qui ont des euros ou des dollars sous leur oreiller aillent investir leur argent dans la livre », invitait le leader lors d’un meeting électoral, fin mai.
Contrarié par la chute de la monnaie nationale, M. Erdogan cherche une parade. En décembre 2016, il avait déjà exhorté ses concitoyens à courir au bureau de change pour se délester de leurs devises étrangères. L’effort de la nation finirait bien par avoir raison de ce « complot » étranger, dénoncé par le président islamo-conservateur comme la source des déboires de la livre turque.

Peine perdue. En un an, celle-ci a perdu un quart de sa valeur face au dollar. Seule l’action musclée de la Banque centrale a permis d’éviter la débâcle, avec deux hausses du loyer de l’argent annoncées coup sur coup, entre fin mai et début juin. Un passage à l’acte presque inespéré, compte tenu du dégoût bruyamment affiché par M. Erdogan pour l’arme des taux d’intérêt. A l’approche d’un scrutin crucial – législatives et présidentielle – le 24 juin, le « Reis » (« le chef », l’un de ses surnoms) s’est sans doute laissé convaincre de l’urgence d’agir face au risque de crise monétaire.
Remède provisoire
Si efficace soit-il, le remède pourrait n’être que provisoire, faute de traiter les véritables problèmes de l’économie turque. En surface, tout semble aller plutôt bien. La dette (28,5 % du produit intérieur brut en 2017) et le déficit (2,3 %) sont maîtrisés. Au premier trimestre, l’activité a caracolé à 7,4 %. Au même rythme qu’en 2017 et plus vite que dans n’importe quel autre pays du G20, y compris la Chine.
Mais cette croissance à bride abattue présente des effets secondaires inquiétants. L’inflation, à deux chiffres, rogne le pouvoir d’achat des ménages. Ces dernières années, l’endettement des entreprises turques a explosé.

Autres actualités

03 - Juin - 2019

Migrations : le Parti du peuple danois impose ses vues mais perd des voix

Vingt-quatre ans après sa création, le Parti du peuple danois (Dansk Folkeparti, DF) a atteint tous ses objectifs. Non seulement la formation de droite souverainiste a réussi...

01 - Juin - 2019

Droits de l’homme en Chine : un enjeu planétaire

Il avait fallu un peu moins de trente ans à la Chine communiste pour lancer, à partir de 1978, les premières réhabilitations des victimes du maoïsme : celles qui...

01 - Juin - 2019

« Askariya ! », « Islamiya ! » : menace sur le mouvement démocratique au Soudan

A peine descendus de leurs bus, ils se regroupent et entonnent des slogans simples comme la contre-révolution : « Askariya ! » (le pouvoir aux militaires !). « Islamiya !...

31 - Mai - 2019

Tensions à Jérusalem pour le dernier vendredi du mois de ramadan

Un adolescent palestinien a été tué, vendredi 31 mai, par des tirs de soldats israéliens près de Bethléem, en Cisjordanie. Ce même vendredi, dans...

31 - Mai - 2019

Après les attentats, le Sri Lanka face à l’effondrement du tourisme

C’est une économie entière qui s’est écroulée en quelques heures : au lendemain du funeste dimanche de Pâques du 21 avril, après la...