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Turquie : Erdogan se pose en défenseur des musulmans opprimés

13 - Décembre - 2017

Le président a convoqué un sommet extraordinaire de l’Organisation de la conférence islamique. Objectif : donner une « réponse forte » à la décision américaine de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan au sommet extraordinaire de l’Organisation de la conférence islamique, à Istanbul, le 13 décembre 2017.
Une cinquantaine de dirigeants et de responsables du monde musulman se réunissent, mercredi 13 décembre, à Istanbul, dans le cadre d’un sommet extraordinaire de l’Organisation de la conférence islamique (OCI) censé apporter, selon le président turc Recep Tayyip Erdogan, « une réponse forte » à la décision américaine de reconnaître Jérusalem comme capitale de d’Israël.
Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, le roi de Jordanie, Abdallah II, les présidents iranien, Hassan Rohani, et libanais, Michel Aoun, seront les hôtes de M. Erdogan, qui assure en ce moment la présidence tournante de l’OCI. L’Egypte et les Emirats arabes unis, dont les relations avec la Turquie sont au point mort, se contentent de dépêcher leurs ministres des affaires étrangères. L’Arabie saoudite sera représentée par le ministre des affaires islamiques.
Lire aussi : La fin du rôle de « médiateur impartial » des Etats-Unis dans le conflit israélo-palestinien
A en croire les médias turcs progouvernementaux, Riyad serait sur la même ligne que le président Erdogan qui, avec sa faconde enfiévrée, tente de s’imposer comme le chantre de la cause palestinienne. « La Palestine est une victime innocente (…), Israël est un Etat terroriste, oui terroriste. Nous n’abandonnerons pas Jérusalem aux mains d’un Etat qui tue des enfants », a vitupéré M. Erdogan, lors d’un discours prononcé dimanche à Sivas (Anatolie) devant ses partisans.
Le chef de l’Etat turc veut galvaniser sa base islamo-conservatrice en vue des échéances électorales de 2019
En toile de fond à son allocution, une photographie non sourcée avait été projetée derrière lui. Elle représentait un adolescent, un Palestinien de Hébron selon la légende, emmené, les yeux bandés, par des individus en uniforme décrits comme des soldats israéliens. « Voyez comment ces terroristes traînent cet enfant de 14 ans ! », a fulminé le président turc.
Le statut de Jérusalem, ville sainte pour les trois religions monothéistes, est « une ligne rouge » pour les musulmans, a averti M. Erdogan à la veille du sommet et tout en se gardant de dire précisément ce qu’il en attendait. Le qu’ils corrigent leur erreur. Nous reconnaissons Jérusalem-Est en tant que capitale de la Palestine dans les frontières de 1967. Ce point figurera dans le texte [présenté aux participants du sommet de l’OCI]. »

Mais il faut être réaliste. « Certains pays arabes ont fait preuve d’une grande timidité envers les Etats-Unis », a finalement reconnu le chef de la diplomatie turque, mardi. Assurément, la Turquie aura du mal à faire parler d’une seule voix les 57 pays membres de l’OCI, une organisation placée sous le patronage de l’Arabie saoudite. Il y a peu de chance que l’Arabie, les Etats du Golfe et l’Egypte compromettent leurs bonnes relations avec Washington. Pour Recep Tayyip Erdogan, la question n’est pas là. Avant tout, le sommet lui offre l’opportunité de redorer son statut de leader du monde musulman sunnite.
Riposte de Nétanyahou
Le plus important à ses yeux est d’apparaître, auprès de son électorat, comme le défenseur de ces croyants opprimés à travers le monde. Cette posture est destinée à galvaniser sa base islamo-conservatrice en vue des échéances électorales de 2019 (municipales en mars, présidentielle et législatives en novembre). « En réalité, Donald Trump a plutôt aidé Erdogan en interne », écrivait mardi l’éditorialiste Barçin Yinanç dans le quotidien Hürriyet. Selon elle, la question du statut de Jérusalem « a fait oublier les confessions embarrassantes de Reza Zarrab, le tradeur turco-iranien dont les confessions [face à un tribunal fédéral à New York] ont révélé une fois de plus le niveau de corruption du gouvernement turc ».
Sur le plan international, la manœuvre est risquée. Elle pourrait aggraver un peu plus la relation avec Washington, laquelle a atteint son plus bas niveau au moment de la crise des visas, quand les portes des consulats respectifs se sont fermées le 8 octobre et n’ont pas rouvert depuis. Avec Israël, les relations risquent de s’envenimer après la normalisation tout juste amorcée en 2016. Une grave rupture était intervenue en 2010 à la suite d’un raid israélien meurtrier (9 morts, 30 blessés) contre le Mavi Marmara, un navire affrété par une ONG islamiste qui se dirigeait vers la bande de Gaza.
Le discours prononcé à Sivas par M. Erdogan a suscité une vive riposte du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, qui a affirmé ne pas avoir « de leçons de moralité à recevoir d’un dirigeant qui bombarde des villages kurdes de Turquie, emprisonne des journalistes, aide l’Iran à contourner les sanctions internationales et soutient des terroristes, notamment à Gaza ».

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