Une génération d’enfants traumatisés à Mossoul

22 - Février - 2017

Une génération d’enfants traumatisés à Mossoul

"C’était un après-midi, tout le quartier de Gogjali était rassemblé. Ils avaient appelé les habitants à venir voir. Des gens jetaient des pierres sur la femme en criant “Allahou akbar”. Son cerveau était éparpillé sur le sol. Ça m’a rendu malade pendant deux mois. Je n’arrivais plus à dormir. Je faisais des cauchemars : ils lapidaient ma mère en face de moi. » Sous une tente du camp de réfugiés d’Hassan Cham, à la lisière du Kurdistan irakien, Fahad, 12 ans, raconte avec détachement, sans ciller de ses grands yeux noirs, la première exécution à laquelle il a assisté pendant les deux ans et demi de règne de l’organisation Etat islamique (EI) à Mossoul. « Il est devenu somnambule. Il venait la nuit, attrapait mes vêtements et criait : “Ils sont là ! Ils sont venus pour nous !” », poursuit sa mère, Nihat, une femme de 28 ans, enceinte de son huitième enfant.
Trois mois après la conquête de la province de Ninive par les djihadistes, en juin 2014, cette famille de Khazir avait été emmenée par l’EI à Gogjali. Elle y a vécu au milieu de familles ralliées à l’EI et des combattants. Nihat a fini par empêcher ses enfants de sortir de la maison de peur qu’ils soient châtiés ou embrigadés.
« Ils emmenaient de force les enfants à la mosquée, explique Fahad. Ils ont essayé avec moi, mais je me suis enfui. J’avais peur qu’ils me fouettent car je n’allais pas prier. Mon ami a été fouetté soixante-dix fois pour ça. Il avait 15 ans, il est parti avec eux. Ils ont réussi à emmener beaucoup d’enfants. Ils les emmenaient en minibus aux entraînements. Ils apprenaient à monter et à démonter des armes. Ils leur retournaient le cerveau à l’école. Ils leurs donnaient des pilules. »

Certains ne parlent plus
La thérapie que le jeune garçon suit avec les travailleurs sociaux et les psychologues de l’ONG Terre des hommes a eu des effets bénéfiques. « Je commence à oublier. Mais je ne veux plus retourner à Gogjali », dit-il. Le programme lancé par l’organisation humanitaire en novembre 2016, avec le soutien de l’Unicef, prend en charge 600 enfants, âgés de 4 à 17 ans, souffrant de traumatismes liés aux violences perpétrées par l’Etat islamique et aux combats qui font rage à Mossoul depuis octobre 2016. « Les cas les plus fréquents sont des troubles de stress post-traumatiques : des enfants incontinents ou qui ne parlent plus, d’autres ont des flash-back ou font des cauchemars sur les...

Autres actualités

16 - Avril - 2020

Coronavirus : en Islande, une campagne de tests massive sur la population

L’Islande n’a pas été épargnée par la pandémie de Covid-19. Ce pays insulaire de 364 000 habitants disposant d’une unique porte...

15 - Avril - 2020

En Afrique du Sud, « si les flics te trouvent à boire dehors, tu peux être sûr de prendre une raclée »

Courbée sous le poids des années, la silhouette de Mama Sipiwe arpente lentement les rues de Soweto. Semblable a tant d’autres en quête de victuailles en ces temps de...

15 - Avril - 2020

Devenu le visage de la lutte contre le coronavirus, le ministre de la santé brésilien au bord du limogeage

« Un médecin n’abandonne pas son patient », répétait à l’envi ces dernières semaines Luiz Henrique Mandetta. Pourtant, mercredi 15...

10 - Avril - 2020

Lars Tragardh : « La Suède lutte contre la pandémie due au coronavirus à travers la “liberté sous responsabilité” »

L’historien suédois Lars Tragardh a vécu une quarantaine d’années aux Etats-Unis, où il a enseigné à l’université Columbia,...

10 - Avril - 2020

Irak : Mustafa Al-Kadhimi, homme de consensus, chargé de former un gouvernement

L’Irak s’est-il trouvé un premier ministre en la personne de Mustafa Al-Kadhimi ? A 53 ans, le chef du renseignement est le troisième candidat à tenter de former...