En Finlande, la coalition au pouvoir se sépare de l’extrême droite

13 - Juin - 2017

En Finlande, la coalition au pouvoir se sépare de l’extrême droite

Le premier ministre Juha ­Sipilä rompt avec les Vrais Finlandais, une formation politique désormais dirigée par l’ultra-radical Jussi Halla-Aho.

Leur alliance aura duré à peine deux ans. Les centristes et conservateurs finlandais ont annoncé, lundi 12 juin, qu’ils rompaient leur coalition de gouvernement avec les Vrais Finlandais (populiste), après l’élection de Jussi Halla-Aho à la tête du parti, deux jours plus tôt. Le premier ministre centriste, Juha ­Sipilä, et son ministre conservateur des finances, Petteri Orpo, ont évoqué des « valeurs divergentes » et une « défiance » empêchant toute collaboration.
Réunis en congrès au nord d’Helsinki, les Vrais Finlandais, qui devaient choisir un successeur au leader historique du parti, Timo Soini, en poste depuis vingt ans, ont créé la surprise en élisant, à une large majorité, samedi 10 juin, le candidat le plus radical, Jussi Halla-Aho. Puis en nommant trois de ses fidèles aux postes de vice-présidents.
« C’est un putsch, constate le politologue Lauri Karvonen. Le parti a été détourné par sa frange la plus radicale, anti-immigration et anti-européenne. » En cause, les règles du vote : chaque militant, au congrès, disposait d’une voix. Sampo Terho avait beau être le favori des fédérations locales, il n’avait aucune chance. « Le camp le plus extrême a réussi à mobiliser le plus d’électeurs », note M. Karvonen.
« Rhétorique haineuse »
Göran Djupsund, professeur à l’université de Turku, évoque « une révolution de palais ». Pour lui, la rupture a été consommée lorsque Jussi Halla-Aho a annoncé, devant les militants, qu’il voulait se rapprocher des autres formations d’extrême droite en Europe, alors que les eurodéputés Vrais Finlandais sont associés depuis 2014 aux élus conservateurs britanniques et polonais.
« Le parti créé par Timo Soini était critique à l’encontre de l’establishment, mais ne remettait pas en cause les valeurs de la démocratie finlandaise », observe Lauri Karvonen. C’est donc, selon lui, une nouvelle formation qui a émergé du congrès de Jyväskylä : « Un parti extrémiste, xénophobe et nationaliste. »
Quelques heures après sa rencontre avec le nouveau leader, lundi matin, le premier ministre a justifié sa décision de rompre avec les Vrais Finlandais en raison « de différences qui sont devenues tellement importantes » qu’elles mettent en jeu la capacité d’agir du gouvernement.
Plus cinglant, le ministre des finances a constaté qu’« il avait fallu vingt ans à Timo Soini pour rendre les Vrais Finlandais capables de gouverner, et deux jours à Jussi Halla-Aho pour tout détruire ». Soulignant que le programme du gouvernement était basé sur des principes fondamentaux, tels que « le respect de la dignité humaine et la primauté du droit », il a martelé que son parti ne pouvait accepter « aucune forme de rhétorique haineuse ».
« Martyrs »
La décision de Jussi Halla-Aho de diriger sa formation depuis Bruxelles, où il siège en tant que député européen, représentait un autre point d’achoppement. « Nous prenons des décisions difficiles, il se passe des choses, et nous devons réagir. Il faut être présent, pas agir par procuration », a commenté Petteri Orpo.
Selon le quotidien Hufvudstadsbladet, les Vrais Finlandais risquent désormais de se présenter en « martyrs ». Jussi Halla-Aho, rappelle Göran Djupsund, n’a pourtant jamais caché qu’il préférait se retrouver dans l’opposition et « agir comme catalyseur, en espérant déteindre sur les autres ».
Dans les prochains jours, centristes et conservateurs vont tenter de former une nouvelle coalition, probablement avec le Parti populaire suédois et les chrétiens-démocrates. Ils devraient pouvoir compter sur le soutien au Parlement de quelques dissidents parmi les plus modérés des Vrais Finlandais, dont certains seraient déjà prêts à claquer la porte du parti. Les sociaux-démocrates et les Verts exigent, pour leur part, la tenue d’élections anticipées.

Autres actualités

26 - Octobre - 2018

Au Brésil, les intellectuels s’élèvent contre le candidat d’extrême droite

Un « cauchemar » : voilà ce que serait l’élection de Jair Bolsonaro pour l’historienne et anthropologue Lilia Schwarcz, professeure à...

26 - Octobre - 2018

Russie, Europe et Turquie tentent de pérenniser la trêve en Syrie

Le sommet sur la Syrie réunissant, samedi 27 octobre en fin d’après-midi, les dirigeants russe, français, allemand et turc ne devrait pas durer plus de deux heures....

25 - Octobre - 2018

Au Yémen, guerre d’usure autour d’Hodeïda

Face à la base d’Al-Khokha, une douzaine de véhicules blindés de l’armée émiratie s’apprêtent à s’engager sur une route...

25 - Octobre - 2018

Brésil : sur les terres de Lula, le « vote fragile » du Parti des travailleurs

Pour trouver le chemin, il faut se repérer tant bien que mal grâce aux quelques bornes kilométriques de la route des environs du village de Caetés, dans le nord-est du...

24 - Octobre - 2018

Le gouvernement burundais absent du dernier round du dialogue de sortie de crise

La dernière session, qui doit se tenir à partir de ce mercredi à Arusha en Tanzanie, doit évoquer l’organisation d’élections inclusives en 2020....