Les Ouïgours, internés dès l’enfance dans des camps chinois
Il a refusé, il y a deux ans, l’ordre, reçu lors d’un séjour d’études à l’étranger, de rentrer, et s’est installé aux Etats-Unis. Ce Ouïgour énumère les membres de sa famille qui ont été arrêtés depuis dans sa région d’origine, non loin de Kachgar, au Xinjiang : « Mon frère, la femme de mon frère, ma belle-mère, mes deux cousins plus âgés, mon oncle et ma tante… » Certains sont en camp de rééducation patriotique, d’autres en prison. Il liste aussi les enfants dont il est sans nouvelles, dont sa demi-sœur de 9 ans et les trois enfants de son cousin. « Le gouvernement n’a laissé aucun adulte en âge de s’en occuper. Ils ne sont avec personne que nous connaissions. »
Pour cet ancien homme d’affaires de 37 ans, nul doute qu’ils ont été envoyés dans un de ces centres pour enfants entre internat, orphelinat et camp d’endoctrinement, dont on commence à parler, il ne voit pas d’autre explication. « Les enfants ne peuvent pas y parler notre langue, y manger notre cuisine, ils sont éduqués comme des Chinois han [ethnie majoritaire] et doivent abandonner leur identité », dit-il.
« Un vaste système »
Où sont envoyés les enfants ouïgours quand leurs parents disparaissent ? Une nouvelle étude du chercheur allemand indépendant Adrian Zenz, basée sur des documents officiels chinois, expose un vaste système visant à prendre en charge les enfants dont les parents sont détenus et à leur inculquer une éducation patriotique en mandarin.
Parallèlement à la construction de camps d’internement, où seraient enfermés environ un million de Ouïgours – minorité turcophone sunnite –, ainsi que des membres d’autres minorités musulmanes de l’extrême Ouest chinois, des centaines de « centres de secours », orphelinats et pensionnats ont été construits ou agrandis depuis 2017.